Homélie du 32e dimanche du temps ordinaire. Mt 25 1-13. « Seigneur, ne me laisse pas tomber en panne sèche ! »

Cette parabole n’est pas catholique pourrait-on dire ; elle est choquante ! Elle l’est surtout pour une personne qui a entendu depuis toujours : le chrétien doit partager, l’ami de Jésus doit partager. Pourquoi donc la parabole met en avant l’attitude de cinq filles dites prévoyantes refusant de partager leur huile avec celles qui en manquaient ? Et pourquoi encore cette parabole met en scène la dureté de l’époux qui refuse d’ouvrir la porte aux filles arrivant en retard : « Amen, je vous le dis : je ne vous connais pas ».

Homélie du 32e dimanche du temps ordinaire. Mt 25 1-13. « Seigneur, ne me laisse pas tomber en panne sèche ! »

Chères sœurs, chers frères : Cette parabole n’est pas catholique pourrait-on dire ; elle est choquante ! Elle l’est surtout pour une personne qui a entendu depuis toujours : le chrétien doit partager, l’ami de Jésus doit partager. Pourquoi donc la parabole met en avant l’attitude de cinq filles dites prévoyantes refusant de partager leur huile avec celles qui en manquaient ? Et pourquoi encore cette parabole met en scène la dureté de l’époux qui refuse d’ouvrir la porte aux filles arrivant en retard : « Amen, je vous le dis : je ne vous connais pas ».

Peut-être que la pointe de cette parabole n’est ni le partage, ni la solidarité, ni la fraternité… Cette parabole pointe plutôt vers un moment définitif que chacun d’entre nous doit passer et elle nous avertit que dans ce moment définitif personne ne peut rien faire pour nous ! Oui, à la fin de nos vies nous aurons un face à face avec le Seigneur. Dans ce face à face nous nous présenterons tels que nous sommes, avec ce que nous avons cueilli, avec surtout ce que nous avons donné… à ce moment-là personne ne pourra rien faire pour nous.

En effet, le texte de l’évangile de Matthieu que nous avons proclamé se situe vers la fin de celui-ci. Ces chapitres sont communément appelés « le Discours de la fin » ou « le discours eschatologique ». Jésus sait que l’heure est arrivée de passer de ce monde à son Père. Il doit affronter le scandale de sa passion. En maître responsable, il prépare ses disciples à tenir bon, à tenir leur place, à veiller « parce que nul ne connaît ni le jour ni l’heure ».

Les cinq filles de l’évangile appelés « prévoyantes » ont pu entrer à la fête de noces parce qu’elles étaient prêtes. L’huile étant un symbole de la persévérance, de l’attente et du désir qui ne s’épuise pas. Les autres filles, les « insouciantes » n’étaient pas prêtes et se retrouvent face à des portes closes. Leur désir s’est envolé, leur endormissement est plus profond et entre-temps la réserve d’huile s’est épuisée. Conséquence fatale : elles ne peuvent pas aller à la rencontre de l’époux qui arrive au milieu de la nuit. Rappelez-vous que dans le même évangile de Matthieu, Jésus avait dit à la foule et en particulier à ses disciples : « vous êtes la lumière du monde » (Mt 5,14). Comment être lumière pour le monde si la flamme de la foi s’épuise faute de combustible.

Qu’avons-nous fait de notre foi, de notre baptême, de notre amitié avec le Seigneur ? Pour accomplir dans le monde notre mission des baptisés, il est important de se réveiller et d’éveiller en nous le désir de rester fidèles au Seigneur jusqu’au bout. « La sagesse ne se flétrit pas » avons-nous entendu dans la première lecture. Le Psaume de la messe nous faisait chanter : « Dieu, tu es mon Dieu, je te cherche dès l’aube, mon âme a soif de toi ».

Frères et sœurs, ce langage de l’évangile est un peu déconcertant pour nous. Cependant il s’agit d’une belle métaphore nous invitant à persévérer dans la foi et dans l’amour, à tout faire pour que dans ce moment de solitude, nous puissions nous présenter humblement et confiants devant notre créateur en lui disant je n’ai peut-être pas fait grand-chose mais j’ai su garder ma lampe allumée en signe d’un amour et d’un désir qui ne se sont pas complétement éteints malgré l’obscurité, la nuit ; malgré la longue attente. Très souvent nous sommes tentés d’abandonner notre foi, de nous compromettre dans la spirale de la violence, de déserter nos convictions, de vivre comme si Dieu n’existait pas… et de rejeter l’évangile parce que trop exigent ou apparemment inopérant. Cependant, nous avons à tenir bon ! A garder nos yeux ouverts et nos lampes allumées. A être des sages avisés qui savent discerner, agir et demeurer fidèles à leur vocation de disciples et amis de Jésus.

Permettez-moi, de vous raconter une anecdote de mon enfance, certes très personnelle mais qui m’a beaucoup marqué. Vivant à la campagne en Colombie, je ne pouvais pas aller à la messe tous les dimanches. Comme vous, chers amis qui suivez la messe à la radio, nous aussi à la maison, nous écoutions religieusement la messe à la radio. Je me souviens que le prêtre disait chaque dimanche au début de chaque homélie ceci : « aujourd’hui nous sommes plus prêts de l’éternité que la semaine dernière ». J’entends encore le timbre de sa voix… Cette phrase ne m’effrayait pas, ne m’a jamais fait peur, mais elle a mis dans ma tête cette idée que plus tard j’ai transformé, voire améliorée en lisant la petite Thérèse de Lisieux : « un jour je serai interrogé sur l’amour ».

Oui, nous savons qu’un jour en pleine nuit, une voix déchirante nous réveillera pour nous présenter devant notre créateur. Je souhaite, désire, j’espère qu’à ce moment-là, notre lampe brillera toujours.

Seigneur ne nous lasse pas tomber en panne sèche ! Amen

 

Roberto Gomez cm

Le 8 novembre 2020

Rue du Bac

 » Mais vous, heureux vos yeux puisqu’ils voient, et vos oreilles puisqu’elles entendent « . Homélie 12 juillet 2020. Chapelle Saint Vincent de Paul – Paris

Chers frères et sœurs, nous connaissons bien la parabole du semeur. Elle ouvre en Saint Matthieu tout un discours qui aura pour forme cette manière particulière de raconter pour transmettre un message. Jésus utilise ainsi des moments de la vie quotidienne connues par tous – ici le geste du semeur, si prégnant dans une société agricole – exemples qui parfois sont devenus si éloignés de la vie quotidienne de nos sociétés contemporaines citadines et automatisées.

 » Mais vous, heureux vos yeux puisqu’ils voient, et vos oreilles puisqu’elles entendent « . Homélie 12 juillet 2020. Chapelle Saint Vincent de Paul – Paris

Chers frères et sœurs, nous connaissons bien la parabole du semeur. Elle ouvre en Saint Matthieu tout un discours qui aura pour forme cette manière particulière de raconter pour transmettre un message. Jésus utilise ainsi des moments de la vie quotidienne connues par tous – ici le geste du semeur, si prégnant dans une société agricole – exemples qui parfois sont devenus si éloignés de la vie quotidienne de nos sociétés contemporaines citadines et automatisées. La parabole du semeur cependant nous parlent encore, ne serait-ce que parce que chacun d’entre nous a pu cultiver parfois un petit jardin ou bien encore quelques plantes sur un balcon et assister ainsi à la croissance de l’une de ses plantations, à l’épanouissement de ce petit jardin dont nous sommes si fiers.

La parabole de ce jour donne lieu à l’énoncé d’une béatitude : « Mais vous, heureux vos yeux puisqu’ils voient, et vos oreilles puisqu’elles entendent ». Cette nouvelle béatitude fait ainsi échos aux propos conclusifs de l’énoncé de la parabole au début du discours de Jésus : « Celui qui a des oreilles, qu’il entende ! » … et si la béatitude a été prononcée à l’intention des disciples, tout le passage évangélique démontre que le Christ ne réserve pas cette parabole aux seuls disciples – nous qui sommes présents fidèlement en cette chapelle – mais à tous ceux qui veulent bien s’arrêter quelques instants pour écouter le Christ – nous qui sommes peut-être exceptionnellement entrés dans cette église ce matin ou tous ceux encore que cette parole rejoindra aujourd’hui d’une manière ou d’une autre. Apparaît ici l’une des premières missions de l’Église, l’une des premières missions du disciple missionnaire : annoncer la parole pour qu’elle soit entendue. Le devenir de cette parole ne nous appartient pas. Nous ne savons pas par avance en quelle terre, celle-ci sera semée – et à la lecture de cet Évangile il apparaît que les échecs seront nombreux entre les sols pierreux et ceux plein de ronces – mais ce n’est pas pour autant qu’il ne faut pas annoncer à temps et à contretemps le message divin. Ici il faut nous arrêter quelques instants : si nous écoutons l’Évangile, si nous entendons une parabole, ce n’est pas un message en tant que tel que nous entendons, une sagesse seulement qui nous est transmise, mais c’est un homme que nous accueillons, c’est le Verbe fait chair qui se donne à voir et à entendre. Nous commettons parfois une erreur au cours de nos célébrations liturgiques. Lorsqu’à la suite de la proclamation de l’Évangile, le prêtre chante : « Acclamons la parole de Dieu » et montre l’Évangéliaire, ce n’est pas d’abord le livre et l’Écriture que nous acclamons mais bien d’abord une personne qui est vivante et qui se donne à voir et à entendre car lorsque deux ou trois sont réunis en son nom, elle est au milieu d’eux. Le Christ est la Parole, le texte évangélique n’est que le moyen de cette parole… Toute écoute nous porte à découvrir le Christ et la béatitude « heureux ceux qui entendent » porte sur l’entente du Verbe fait chair. La même béatitude ne dit-elle pas : « heureux ceux qui voient ». Par l’écoute nous n’avons pas seulement entendu une sagesse, accueilli un message mais bien entendu et vu le Fils et accueillit sa vie en nous.

Ainsi entendre l’Écriture, c’est bien évidemment entendre le Verbe fait chair, et l’Écriture est un lieu incontournable de cette rencontre. Les images bucoliques des paraboles sont une clef de lecture et de compréhension et d’accueil pour chacun d’entre nous. Le texte biblique nous y plonge tout entier et résolument. Nos premiers aïeux rencontraient le Seigneur au Jardin primordial. Nous nous sommes appelés tout autant à le rencontrer dans un jardin. Comme le rappelait Benoît XVI dans une très belle homélie inspiré des Pères de l’Église, nous sommes appelés à le rencontrer au Jardin des Écritures. Le pape nous invitait alors à descendre dans ce jardin et à nous y promener. Ce jardin, chers frères et sœurs, n’est pas une nature sauvage mais un lieu de repos et d’harmonie car ce jardin nous donne le Christ lui-même. Or, ce jardin des Écritures, c’est le jardin du huitième jour, le jardin des Béatitudes nous entraîne bien au-delà du premier jardin perdu. Comme l’épouse du Cantique des cantiques, alors que nous cherchons notre bien-aimé, et alors que nous franchissons livre après livre les portes et enclos de ce jardin, nous y rencontrons finalement le Jardinier du 8ème jour, le Jardinier du jour de Pâques qui nous ouvrent le sens de ce qui nous ait dit et annoncé par les Prophètes, le sens de ce qui nous ait dit par les paraboles. Au cœur des Écritures, au cœur du matin de Pâques, le divin jardinier nous redit : « Marie » ; et à notre tour nous répondons : « Rabbouni ». Nous comprenons mieux ainsi la profondeur de la béatitude de ce jour : « Mais vous, heureux vos yeux puisqu’ils voient, et vos oreilles puisqu’elles entendent », en effet heureux sommes-nous car en comprenant la parabole, nous avons entendu et vu le Christ nous appeler personnellement, tous et chacun, nous sommes au cœur du jardin.

Dans cette joie qui nous habite à l’écoute du Sauveur, nous découvrons que ces paraboles que nous accueillons, ce jardin des Ecritures que nous traversons font de nous une créature nouvelle, font de nous ce jardin nouveau. Nous avons entendu le psalmiste nous dire : « Tu visites la terre et tu l’abreuves, tu la combles de richesses ; les ruisseaux de Dieu regorgent d’eau, tu prépares les moissons » et d’ajouter : « Les herbages se parent de troupeaux et les plaines se couvrent de blé. Tout exulte et chante ! » Ces herbages, Frères et sœurs, ces plaines, ce tout qui chante, Chers amis, c’est nous-mêmes qui nous parons, c’est nous-mêmes qui chantons pour une vie nouvelle car une vie qui accueille le Seigneur ; car notre vie lorsqu’elle accueille le Seigneur, se fait parabole pour ceux qui nous écoutent, se fait jardin pour ceux qui nous rencontrent. Ce que nous apprécions lorsque nous rencontrons un homme ou une femme de Dieu, c’est le repos qu’il nous procure, c’est le Christ qu’il nous donne, c’est l’amour de Dieu dont il nous partage les mystères.

Oui, mes amis, réjouissons-nous car « heureux [nos] yeux puisqu’ils voient, et [nos] oreilles puisqu’elles entendent ». Comme le disait Isaïe : « La pluie et la neige qui descendent des cieux n’y retournent pas sans avoir abreuvé la terre, sans l’avoir fécondée et l’avoir fait germer » et d’arides – et nous devons le reconnaître – que nous sommes parfois, la rencontre du Seigneur Vivant par l’écoute de sa parole peut faire de nous des jardins à l’ombre desquels nos proches aimeront à venir se reposer. Mais au fait frères et sœurs, nos proches aiment-ils à venir se reposer auprès de nous ? C’est peut-être en ce dimanche la question que nous avons à nous poser et la prière que nous avons à faire : que notre vie de foi soit une parabole rafraîchissante parce que partagée pour ceux que nous fréquentons et non pas pour nos proches un discours desséchant parce que simplement asséné. Ce petit jardin que nous cultivons sur nos balcons est peut-être une parabole de nos vies. Amen.

Écouter la Parole de ce jour

Outre notre bel octave de Buglose, sous les premiers charmes de l’automne, nous sommes comblés par ce que nous venons de vivre ces derniers jours et d’écouter en ce dimanche.

Écouter la Parole de ce jour

Outre notre bel octave de Buglose, sous les premiers charmes de l’automne, nous sommes comblés par ce que nous venons de vivre ces derniers jours et d’écouter en ce dimanche. A quelques soixante kilomètres d’ici, est situé un village désormais paré deux fois de pourpre, rouge par son piment, rouge par son cardinal, Roger Etchegaray ; il fut inhumé dans le caveau familial du village basque de son enfance proche d’une autre famille célèbre, celle du Père Armand David, le lazariste découvreur du Panda et missionnaire botaniste. Ces deux hommes issus de la même terre ont foulé le même champ apostolique de la lointaine Chine pour y faire entendre le message évangélique et y parler du Christ, seul Sauveur des hommes. Ce qui est frappant chez ces êtres d’exception épris d’humilité, c’est qu’ ils sont passés par un enracinement typé fait de solidité et d’endurance, doués d’une forte nature, d’une volonté à toute épreuve et d’une foi toujours prête à se donner sans réserve ni économie, à ‘rendre compte de son espérance’.

Pourquoi les évoquer aujourd’hui ? Parce qu’ils me font écouter la Parole de ce jour avec une oreille ouverte autrement, parce qu’ils sont arrivés au comble du bonheur, j’ai envie grâce à eux, de regarder ce Père des cieux amoureux des hommes qui nous attend tous et que nous chrétiens d’ici et d’ailleurs, avons toujours à annoncer. Ce père est bon comme celui de l’évangile. Il est réticent à se séparer d’un trop jeune fils, exécutant ses désirs malgré tout, et, des temps et des temps plus tard, scrutant l’horizon pour mieux apercevoir sa silhouette chérie revenant à la maison, être saisi de compassion, courir à sa rencontre, le couvrir de baisers , le revêtir comme un prince, lui passer la bague d’alliance, organiser la fête et calmer son frère à la jalousie déplacée. Ce Père se montre aussi ‘bon berger’, à la recherche exclusive de la brebis perdue et ‘bon balayeur’ à la quête de la pièce d’argent qui roule à la dérive dans quelque coin obscur de sa maison. Dieu est un empressé, un chercheur d’hommes, un insatisfait de sa battue tant qu’il n’a pas retrouvé l’objet ou le sujet de sa tendresse. J’aime ce Dieu la, le vrai Dieu, Celui qui s’est abaissé jusqu’à l’extrême. Quel regard habituel je porte sur Lui ? Est-ce que je convertis mon regard s’il est toujours tourné vers un Dieu avide de répression et de punition ? C’est à un accueil chaleureux que j’ai à m’ouvrir car il m’attend, bras et cœur ouverts.

Certes, je suis souvent de la race des « chiens perdus sans collier » comme celui qui a traîné toute la semaine, sur la place du Berceau, au gré de nos humeurs. Nous sommes de ce « peuple corrompu », adorateur de veau d’or ou d’argent selon les traditions bibliques. Et nous mériterions châtiment mais Dieu ne varie pas et reste délibérément optimiste sur la créature que nous sommes. Inlassablement, Il nous aime ! Et il martèle par st Paul interposé : « le Christ Jésus est venu dans le monde pour sauver les pécheurs ». Et le Christ, c’est son fils, son Bien aimé, son image parfaite, sa réplique, son double, l’expression éclatante de sa bonté toujours avide de partager l’amour et de le partager à l’homme. Est-bien ainsi que je m’approche moi-aussi de lui, cœur dilaté, toujours prêt à aimer et à répandre le bien sans frontières?

Et je reviens au Cardinal d’Espelette plus basque que romain et qui nous a confié de mille manières ce qui fit battre son cœur d’apôtre de la paix, le poussant à des milliers de kilomètres et qui fut le moteur de sa vie. Je le cite en remerciant Dieu de me l’avoir donné comme évêque à Marseille et puis, comme pèlerin du Berceau et de Buglose en 1981,  clamant sans se lasser à toutes races « l’amour du Christ nous presse » ; écoutez-le:

« -Heureux celui qui, ayant découvert cette source de l’amour, ne sait plus s’en détacher !

-Heureux celui qui, buvant à cette source de l’amour, voit la soif grandir à l’instant même où elle est comblée !

Heureux celui qui ne peut contenir son admiration et va, comme un fou errant, crier l’amour du Christ par-dessus les toits et de colline en colline ! »[1].

Amen.

[1] « J’avance comme un âne » – Roger Etchegaray Fayard 84 – L’amour du Christ nous presse p 89

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Outre notre bel octave de Buglose, sous les premiers charmes de l’automne, nous sommes comblés par ce que nous venons de vivre ces derniers jours et d’écouter en ce dimanche. A quelques soixante kilomètres d’ici, est situé un village désormais paré deux fois de pourpre, rouge par son piment, rouge par son cardinal, Roger Etchegaray ; il fut inhumé dans le caveau familial du village basque de son enfance proche d’une autre famille célèbre, celle du Père Armand David, le lazariste découvreur du Panda et missionnaire botaniste. Ces deux hommes issus de la même terre ont foulé le même champ apostolique de la lointaine Chine pour y faire entendre le message évangélique et y parler du Christ, seul Sauveur des hommes. Ce qui est frappant chez ces êtres d’exception épris d’humilité, c’est qu’ ils sont passés par un enracinement typé fait de solidité et d’endurance, doués d’une forte nature, d’une volonté à toute épreuve et d’une foi toujours prête à se donner sans réserve ni économie, à ‘rendre compte de son espérance’.

Pourquoi les évoquer aujourd’hui ? Parce qu’ils me font écouter la Parole de ce jour avec une oreille ouverte autrement, parce qu’ils sont arrivés au comble du bonheur, j’ai envie grâce à eux, de regarder ce Père des cieux amoureux des hommes qui nous attend tous et que nous chrétiens d’ici et d’ailleurs, avons toujours à annoncer. Ce père est bon comme celui de l’évangile. Il est réticent à se séparer d’un trop jeune fils, exécutant ses désirs malgré tout, et, des temps et des temps plus tard, scrutant l’horizon pour mieux apercevoir sa silhouette chérie revenant à la maison, être saisi de compassion, courir à sa rencontre, le couvrir de baisers , le revêtir comme un prince, lui passer la bague d’alliance, organiser la fête et calmer son frère à la jalousie déplacée. Ce Père se montre aussi ‘bon berger’, à la recherche exclusive de la brebis perdue et ‘bon balayeur’ à la quête de la pièce d’argent qui roule à la dérive dans quelque coin obscur de sa maison. Dieu est un empressé, un chercheur d’hommes, un insatisfait de sa battue tant qu’il n’a pas retrouvé l’objet ou le sujet de sa tendresse. J’aime ce Dieu la, le vrai Dieu, Celui qui s’est abaissé jusqu’à l’extrême. Quel regard habituel je porte sur Lui ? Est-ce que je convertis mon regard s’il est toujours tourné vers un Dieu avide de répression et de punition ? C’est à un accueil chaleureux que j’ai à m’ouvrir car il m’attend, bras et cœur ouverts.

Certes, je suis souvent de la race des « chiens perdus sans collier » comme celui qui a traîné toute la semaine, sur la place du Berceau, au gré de nos humeurs. Nous sommes de ce « peuple corrompu », adorateur de veau d’or ou d’argent selon les traditions bibliques. Et nous mériterions châtiment mais Dieu ne varie pas et reste délibérément optimiste sur la créature que nous sommes. Inlassablement, Il nous aime ! Et il martèle par st Paul interposé : « le Christ Jésus est venu dans le monde pour sauver les pécheurs ». Et le Christ, c’est son fils, son Bien aimé, son image parfaite, sa réplique, son double, l’expression éclatante de sa bonté toujours avide de partager l’amour et de le partager à l’homme. Est-bien ainsi que je m’approche moi-aussi de lui, cœur dilaté, toujours prêt à aimer et à répandre le bien sans frontières?

Et je reviens au Cardinal d’Espelette plus basque que romain et qui nous a confié de mille manières ce qui fit battre son cœur d’apôtre de la paix, le poussant à des milliers de kilomètres et qui fut le moteur de sa vie. Je le cite en remerciant Dieu de me l’avoir donné comme évêque à Marseille et puis, comme pèlerin du Berceau et de Buglose en 1981,  clamant sans se lasser à toutes races « l’amour du Christ nous presse » ; écoutez-le:

« -Heureux celui qui, ayant découvert cette source de l’amour, ne sait plus s’en détacher !

-Heureux celui qui, buvant à cette source de l’amour, voit la soif grandir à l’instant même où elle est comblée !

Heureux celui qui ne peut contenir son admiration et va, comme un fou errant, crier l’amour du Christ par-dessus les toits et de colline en colline ! »[1].

Amen.

[1] « J’avance comme un âne » – Roger Etchegaray Fayard 84 – L’amour du Christ nous presse p 89

Homélie du 31° Dimanche du Temps Ordinaire – Chapelle de la Médaille Miraculeuse – Paris

La belle figure de Zachée et sa rencontre bouleversante avec Jésus sauveur nous est proposée aujourd’hui pour notre méditation. Qui est Zachée ? Qui représente-t-il dans ce récit ?

Homélie du 31° Dimanche du Temps Ordinaire – Chapelle de la Médaille Miraculeuse – Paris

Chères sœurs et chers frères présents dans cette chapelle ou chez vous qui écoutez la messe à travers France culture.

La belle figure de Zachée et sa rencontre bouleversante avec Jésus sauveur nous est proposée aujourd’hui pour notre méditation. Qui est Zachée ? Qui représente-t-il dans ce récit ?

  • Du point de vue de la foule, Zachée est une personne non fréquentable. On le pointe du doigt parce qu’il est chef des collecteurs d’impôts. C’est ce qu’on appelle un publicain. En termes plus modernes il s’agit d’un collaborateur qui vole la population. C’est un canaille qui s’enrichi sur le dos des autres. C’est pour cela que les gens murmurent en disant : « C’est chez un pécheur qu’il est allé loger ». Bref, Zachée est un pécheur public !
  • De son point de vue à lui, il semblerait que Zachée soit stigmatisé par sa petite taille : c’est à cause de la foule et de sa petite taille qu’il lui est impossible de voir Jésus traversant la ville de Jéricho, la ville la plus basse dans le monde, à moins 240 mètres sous le niveau de la mer. Bref, non seulement il est détesté de tous mais il a une basse considération de lui-même. Il a honte de ce qu’il fait, de ce qu’il a fait !
  • Cependant, Zachée a un atout, un avantage : il est curieux, récursif et il est en mouvement! Il veut voir Jésus. C’est un désir vif et profond, pas seulement une banale curiosité ; peut-être pourrait-il le rencontrer ? Deux obstacles sont à surmonter : la foule qui lui fait écran et toujours cette petitesse qui l’empêche de se hisser, de se mettre à niveau. Alors, « il court en avant » et grimpe sur un sycomore. « Courir en avant » est une expression étrange dans la Bible. Elle décrit une poussée intérieure et profonde comme celle du Disciple bien-aimé et de Pierre le matin de Pâques.
  • Zachée représente à nos yeux toute ces personnes qui voulant voir Jésus, sont empêchées de la faire par la honte, la culpabilité et la stigmatisation qui s’en suit.

Dans cette histoire, c’est la rencontre avec Jésus qui change tout. Zachée est perché sur son sycomore, il veut voir Jésus passer ; mais il ignore que Jésus veut le voir aussi. En fait, le titre de cet épisode pourrait bien être : « Deux regards qui se croisent », n’est-ce pas ?  Zachée veut voir Jésus, mais il ignore que Jésus veut le voir aussi. D’ailleurs c’est Jésus qui levant les yeux lui dit : « Zachée, descends vite : il me faut aujourd’hui demeurer dans ta maison ». Il y a ici une nécessité, une urgence : il me faut demeurer chez toi. Le voyage de Jésus n’est pas une promenade, il ne fait pas un tour. Au contraire ce voyage de Jésus est un rendez-vous avec l’Homme, avec tout homme, avec l’homme Zachée. Jésus fait du chemin et chemin faisant se révèle dans l’aujourd’hui des personnes de bonne volonté. Il me faut AUJOURD’HUI être chez toi. Cet adverbe de temps, est très important dans la théologie de l’évangile de Luc. Du début à la fin de son évangile, Luc parle de l’aujourd’hui de Dieu qui est l’actualisation de son œuvre de salut : « Aujourd’hui nous est né dans la ville de David un sauveur », voilà le premier aujourd’hui dans l’évangile de Luc. « Aujourd’hui tu seras avec moi dans le paradis », voilà le dernier aujourd’hui dans ce même évangile.

Frères et sœurs, laissons résonner dans nos cœurs aujourd’hui ces parles de Jésus que jadis il adressait à notre frère jumeau Zachée : « Descends vite, il me faut aujourd’hui être chez-toi ».  Personne n’est trop petite pour Dieu. Personne ne doit désespérer de Dieu. Dieu nous cherche toujours avec espérance !

Alors c’est avec joie et rapidement que Zachée accueille Jésus chez lui. Et Jésus ose rentrer chez le pécheur public que tout le monde déteste et pointe du doigt. Quelle liberté de Jésus ! En disqualifiant Zachée la foule disqualifie aussi Jésus ; mais rien ne l’arrête. Telle est sa mission : chercher et sauver CE qui est perdu.

Zachée fait la vérité devant Jésus. Sa rencontre dans l’intimité avec le sauveur lui fait prendre conscience de ses torts. Le moi qui le condamnait et le tyrannisait (tu es un pécheur, tu es perdu, tu n’as plus d’espoir…) fait un pas de côté. Ce n’est pas devant soi que l’on peut faire la vérité mais bel et bien devant Dieu : De nous réhabilité, Dieu nous sauve, Dieu nous récrée, Dieu ouvre devant nous un avenir nouveau et le rend possible.

Zachée est un Fils d’Abraham, c’est-à-dire un fils de Dieu, aimé et désiré. Contemplons Jésus, ses paroles, son regard. Il cherche Zachée depuis toujours. Il le cherche parce qu’il y en lui quelque chose qui se perd. Il y a chez Zachée et chez chacun de nous une partie qui risque de nous perdre ou de se perdre. Voilà, pourquoi aussi Jésus cherche à nous voir et à nous rencontrer.

Détail magnifique du texte de Luc : il écrit : « le Fils de l’homme est venu chercher et sauver CE qui était perdu ». « CE » et non pas « CEUX ». Ce détail change tout ! Le Fils de l’homme n’est pas venu chercher et sauver CEUX qui se perdent, c’est-à-dire les autres. On serait tenté de penser que moi, je ne me perds pas… en ce cas-là, Jésus serait venu pour les autres, pour ceux qui se perdent. Or, aujourd’hui l’évangile nous fait pointer CE qui se perd en nous. Nous sommes donc cherchés et sauvés par Jésus.

Amen, Alléluia !!!

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Le Mois Missionnaire Extraordinaire et l’esprit missionnaire vincentien

Les estomacs des affamés du monde entier parlent la même langue … Les cœurs des pauvres du monde entier parlent la même langue … Les missionnaires du monde entier communiquent dans la même langue, le langage de l’amour …

Le Mois Missionnaire Extraordinaire et l’esprit missionnaire vincentien

Les estomacs des affamés du monde entier parlent la même langue … Les cœurs des pauvres du monde entier parlent la même langue … Les missionnaires du monde entier communiquent dans la même langue, le langage de l’amour …

Le Mois Missionnaire Extraordinaire (octobre 2019) a été annoncé par le pape François à l’occasion du centenaire de la Lettre apostolique Maximum Illud du pape Benoît XV. Le thème choisi est “Baptisé et Envoyé : l’Église du Christ en mission dans le monde”, une initiative qui vise à faire prendre conscience de la valeur de la mission et à revitaliser le sens des responsabilités dans l’annonce de l’Évangile par un nouvel enthousiasme.

La mission est définie comme : “La vocation ou l’appel d’une organisation religieuse, en particulier chrétienne, à aller dans le monde et à répandre sa foi. Le concept de mission n’est pas nouveau dans l’Église. La Bible nous parle de la mission dès le début du genre humain. Avec l’amour de Dieu pour son peuple élu, les Israélites ont créé le besoin de missionnaires pour leur communiquer le message d’amour et de paix de Dieu. Les prophètes de la Bible étaient des missionnaires, ils ont quitté leur pays, leur peuple, leur culture pour vivre significativement les nouvelles situations dans lesquelles ils ont été placés par Dieu. Dans le Nouveau Testament, nous voyons Jésus devenir lui-même un missionnaire, passant d’un endroit à un autre pour proclamer une vie bonne et morale. A travers ses enseignements Saint Vincent a adopté le même esprit du Christ pour devenir un véritable missionnaire.

Je crois que l’identité vincentienne est dans la mission. La mission ne devient possible et réussie que si elle est accomplie avec amour et charité.

Le pape François nous appelle à redéfinir le concept de mission. Il nous invite à participer à une prédication enthousiaste de l’Évangile. La redéfinition de notre mission ne devrait pas être uniquement pour ce Mois Missionnaire Extraordinaire, mais pour toute notre vie. La notion traditionnelle de mission nous est familière.

Mais pour redéfinir la mission traditionnelle avec plus de responsabilité et d’enthousiasme, je suggère que les vertus suivantes soient assumées personnellement par chacun :

  1. Foi en Dieu:la foi dépasse nos attentes. Je crois que tout est possible pour et avec Dieu. La foi est une confiance totale et la confiance en Dieu. C’est croire aux promesses de Dieu. Il peut y avoir des moments dans la vie d’un missionnaire où on se sent seul. Il peut sembler que nous sommes seuls sur terre et cela est décevant. C’est alors qu’un vrai missionnaire a besoin de s’accrocher à Dieu. En mission, on peut parfois se sentir bien et parfois moins bien. Toutefois, ce que nous devrions toujours croire en la parole de Dieu qui nous dit : “Je suis avec vous pour toujours” Mt 28; 20. Que nos missions deviennent des exemples de la foi d’un Fils en son Père.
  2. Aimez les autres:L’amour est un ensemble complexe d’émotions, de comportements et de croyances associés à de forts sentiments d’affection, de protection, de chaleur et de respect pour tous. Le cri de saint Vincent ramena les cœurs des pécheurs au Christ. Notre mission devient le lieu de la présence de Dieu lorsque nous transmettons son amour pour les autres. Il est difficile d’aimer une terre étrangère, sa culture et ses habitants comme s’ils étaient des nôtres. Nous ne pouvons le faire qu’en donnant vie au Christ, comme l’a fait notre fondateur Saint-Vincent. Que nos missions deviennent des lieux d’amour.
  3. La charité pour tous:La charité signifie la volonté de faire preuve de gentillesse et de compassion. La charité est plus que faire de l’humanitaire. En tant que missionnaires vincentiens, nous devons être toujours prêts à motiver les gens pour aider ceux qui sont dans le besoin, comme l’a fait saint Vincent. La charité passe aussi par le fait d’offrir notre temps, nos talents et nos ressources pour le bien-être des personnes dans notre mission. Tout ce dont nous avons besoin, c’est d’une attitude de générosité. Que nos missions deviennent des centres de charité, où tous vivent la gentillesse et prennent soin des autres.

L’identité de la Congrégation de la Mission en tant que congrégation internationale de missionnaires clarifie en soi son objectif. L’objectif de tous les vincentiens devrait être de dépasser les frontières des communautés locales, des régions et des provinces pour établir une frontière plus large pour le Christ. L’esprit de mission devrait s’enflammer en nous. Le feu de l’amour du Christ et de son peuple ne doit jamais permettre à un vincentien de rester inactif dans sa vie. Nous ne pouvons pas nous permettre de trier en fonction de leur moralité les estomacs affamés à nourrir.

Ce qui compte dans notre vie de Vincentien, c’est la gentillesse et la compassion associées à l’amour pour Dieu et son peuple. Tout ce dont nous avons besoin est de façonner ensemble notre avenir en tant que vincentien. Quand tous les autres donnent des choses pour la vie, un vincentien appelle à se donner. Si je suis riche, je dois être encore plus riche en donnant. Ce Mois Missionnaire Extraordinaire nous incite à redéfinir notre attitude à l’égard de la mission. Faisons de la mission notre priorité. Nous sommes des missionnaires où que nous soyons. Essayons d’étendre la charité et la morale de Dieu et de notre fondateur à tous ceux que nous connaissons. Demandons à Saint Vincent d’intercéder pour nous tous afin que nous devenions des missionnaires rajeunis avec enthousiasme et zèle pour la mission.

Traduit de l’Italien par
Jean Baptiste GNING
Province de France

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