Marc Thieffry
Rencontre de Vichy (7-9 octobre 2018)
Rencontre de Vichy (7-9 octobre 2018)
Étaient présents : François Hiss (absent de la photo) – Aimé Goliet – Pierre Hugon – Jean-Claude Sperandio – Antoine Tejedor – Pierre et Carmen Damiens – Dominique et Danielle Lê – Jean Logean – Jean et Michèle Prezeau – Marc et Patricia Thieffry – Béatrice Garreau – Firmin Mola Mbalo – Lâm.
Venant de différents endroits de la France, nous nous retrouvons tous le dimanche soir, autour d’un apéritif offert par les confrères de la maison. Temps de retrouvailles, d’échanges, de partage.
Nous établissons le programme du lendemain : on se retrouvera à 9H dans la bibliothèque et commencera le temps du partage. A 11H, célébration eucharistique qui sera présidée par François Hiss, supérieur de la maison. Puis viendra le temps du repas. En début d’après-midi, visite du musée et ensuite reprise du partage. Repas à 19H.
- Lundi 8 octobre
Après le petit-déjeuner, tout le monde se retrouve pour l’ouverture de la rencontre. Ceux qui ont reçu des nouvelles des absents nous lisent leur courrier.
Jean Zanolini, le matin du 8, a envoyé ce message à Aimé : « Bonjour à tous. Ne pouvant être présent pour cette énième rencontre fraternelle, j’ai demandé à Aimé d’être mon interprète pour vous souhaiter une rencontre gratifiante pour tous et régénératrice de chaleur pour chacun d’entre vous. Une prière pour la santé de mon épouse lors de l’Eucharistie est sollicitée. En Saint Vincent, je vous embrasse tous très fraternellement et vous donne rendez-vous l’an prochain, si la Providence m’octroie ce privilège. Jean Zano. »
Daniel Lamerand ne peut venir aujourd’hui pour raison de santé, s’ajoutant au fait que la date de notre rencontre coïncide avec celle d’une double ordination diaconale à St Lazare. Il a confié une lettre à JC pour nous dans laquelle il explique que ses problèmes de santé ont augmenté depuis la canicule de cet été et il craint maintenant de chuter en se déplaçant. Il n’ose plus conduire sa voiture, ne voit plus trop bien et donc lit avec difficulté, ce qui ne l’empêche pas d’aller régulièrement à l’EHPAD visiter des personnes âgées peu entourées, surtout des confrères. Il nous assure que nous avons toute notre place dans sa célébration de l’eucharistie.
Claude Lautissier prend en ce moment quelques jours de vacances, motif de son absence.
Michel Réveille ne se déplace plus seul car il voit mal et craint de chuter ou d’être bousculé. Il reste en contact avec des militants ACO-JOC et avec le CASAM (Collectif d’Accueil pour les Solliciteurs d’Asile en Moselle). Il retrouve régulièrement d’autres prêtres pour une journée ‘Révision de vie’. Il nous conseille le livre : ‘Espérer Croire’ de Gianni Vattimo aux Éditions du Seuil. La thèse de ce philosophe est que le principe de la sécularisation des sociétés humaines réside dans l’incarnation du Christ. Il voit une transcription du message chrétien pour l’époque actuelle.
Gonzague Danjou, qui réside à St Lazare, ne peut pas venir à Vichy car sa mobilité est réduite, mais se joint « par la pensée et la prière à cette rencontre fraternelle ».
Yves Danjou, son frère, réside à Amiens. Bien qu’encore bien mobile, il rechigne à se déplacer. L’âge aidant, il reste tranquillement dans la maison lazariste d’Amiens dont il assure l’économat tout en rendant quelques services pastoraux. Libéré de son ministère en Turquie, il a passé la main à Elie Delplace comme représentant légal du Lycée Saint-Benoît d’Istanbul. Il donne le bonjour à tous les amis réunis à Vichy.
Jean-François Lagoueyte regrette de ne pas pouvoir venir pour raison de santé. Il n’ose pas faire le voyage de Marseille à Vichy cette année, car à la suite d’une chute le mois dernier, il souffre de maux divers, à la tête surtout, et doit se soumettre à toute une série d’examens médicaux. En revanche, il nous donne des nouvelles d’amis récemment visités : Jean-Marc Bascuñana est en mauvaise santé ; Michel Briau est lui aussi très fatigué, toujours seul mais bien entouré par des amis. ; et André Meyranx, réside maintenant chez son frère à Mugron dans les Landes depuis que son épouse a été placée en maison de retraite médicalisée.
Le 9 octobre (donc trop tard pour pouvoir être lu le 8), un message complémentaire de Jean-François a été adressé à Aimé : « … J’ai passé ce matin une IRM du cerveau et je vois mon neurologue à la Timone dans quelques jours. Jean-Marc Bascuñana, affecté par un Parkinson en progrès, vient de passer un séjour d’observation en gérontologie. Vu son état, il ne peut pas revenir en communauté. Nous sommes en recherche d’un EHPAD pour les jours prochains. C’est un moment difficile pour lui. Michel Briau a été admis pour un mois dans un EHPAD de Martigues, avant de rejoindre son appartement que des copains sont en train de remettre en état. Michel est également fatigué (88 ans), mais il est bien entouré de vrais amis. Avec Michel et Jean-Marc, nous nous sommes retrouvés chez André Meyranx cet été. Josette, la compagne d’André, très diminuée par sa maladie, a été placée par ses enfants dans une maison spécialisée et André a quitté Fos pour Mugron, dans les Landes, chez son frère Laurent. Il y a un an, Paul Vincent nous quittait. Je reste en lien avec sa femme Bernadette et leur fille Magalie. Albert Loiodice est à Toulon, toujours avec des ennuis de santé qui l’immobilisent. Ainsi va la vie, avec du bon et du moins bon ! Bonne rencontre et toute mon amitié à tous ». Jean Joie
Jacques Gros nous envoie régulièrement sa « lettre aux amis », que JC diffuse aussitôt à tous les « amis de Vichy » (du moins à ceux qui ont une adresse internet !) et dont la lecture est toujours source d’enrichissement spirituel. Dans sa dernière « lettre aux amis », il évoquait sans grand enthousiasme un éventuel futur transfert à Surabay (il réside actuellement à Batulicin : chacun trouvera facilement ces lieux sur une carte d’Indonésie). Dans un message du 18 septembre : « Je ne serai pas de la partie à Vichy. Peut-être l’année prochaine si mon visiteur persiste à vouloir me transférer à Surabaya…et si Dieu me prête vie ». Il nous fait part de son agenda très chargé pour la période actuelle en raison de divers anniversaires (80 ans de son diocèse, 10 ans d’ordination épiscopale de son évêque, inauguration d’églises, plusieurs récollections, fête de St Vincent, etc. etc.). Il termine son message par : « Côté santé physique, pas de problèmes ; santé morale et spirituelle, toujours à remettre en chantier. Amitiés à tous ».
Depuis le terrible tsunami qui a frappé l’Indonésie (île de Célèbes), Jacques a envoyé (le 4 octobre) ce message rassurant : « Bornéo, mon île, est hors de la ligne des tremblements de terre et donc des tsunamis. Cette ligne passe au sud et à l’est de chez nous (c’est le heurt tectonique entre l’Australie et l’Asie). Le nombre de morts augmente chaque jour et les secousses continuent sporadiquement à se faire sentir, moins fortes mais traumatisantes pour ceux qui ont été déjà touchés. Nous suivons cela à la TV mais c’est loin. Jusqu’ici, des gens que je connais, originaires des Célèbes où ont lieu ces tremblements et qui sont à Bornéo Sud avec moi, aucun n’a dans sa famille des victimes de ces fléaux. Mais nous nous sentons bien sûr en empathie avec les victimes. Encore toute mon amitié à tous ceux qui viendront à Vichy. Fraternellement. »
Pepito Campaña. Il annonce qu’il ne pourra pas venir (il est en voyage au Maroc). Il nous a envoyé en juin une longue lettre dans laquelle essentiellement il décrit son précédent voyage en Chine qui l’a beaucoup impressionné. Il reste, on le voit, toujours passionné par des voyages en terres lointaines !
Jean Haillet a demandé à JC, il a quelques jours, de diffuser aux « amis de Vichy » son CV détaillé, ainsi que plusieurs textes qui témoignent de son intense activité associative comme rédacteur de textes érudits et philosophiques pour l’Université du Temps Libre de Tarbes et de la Bigorre (textes qui ont été diffusés et que chacun a pu déjà lire in extenso.). Il est également militant à l’ADMD (Association pour le Droit de Mourir dans la Dignité).
Il nous donne aussi quelques nouvelles de Michel Beyoglian qui semble avoir quelques problèmes de santé, au physique comme au moral. En janvier dernier, JC a contribué à faire la promotion du livre très intéressant de Michel dans lequel il raconte de façon humoristique son quotidien de professeur de lettres quand il était en activité à l’École apostolique de Cuvry.
Maurice Vialeton, dans un message du 16 juin dernier, nous donne de bonnes nouvelles de ses petits-enfants, ainsi que de lui-même et de son épouse Danielle, tous deux présentement en vacances en Croatie. Le 11 septembre, Maurice a confirmé son précédent message. Il regrette de ne plus avoir de nouvelles de Jean-François Calvel, avec qui il était en relation. Il souhaite à tous les anciens de Vichy bonheur et santé.
Michèle Prézeau nous donne des nouvelles de Bernardo Garcia, qui réside à Château-L’Évêque (près de Périgueux) où il assure l’aumônerie de la maison de retraite des filles de la Charité. Il souffre de quelques problèmes de santé qui lui font craindre les longs déplacements, même en voiture, – motif invoqué de son absence -, à moins que le vrai motif soit plutôt de « ne pas abandonner ses sœurs » ! Il reste en lien avec Christian Labourse, qui a repris un service pastoral non loin de là.
Après les nouvelles des uns et des autres, nous commençons notre tour de table (ou de fauteuils !)
Antoine Tejedor a déménagé de la campagne vers la ville. Lui et son épouse sont fatigués mais contents d’avoir fait ce transfert. La famille de son fils habite leur ancien logement. Cela l’a amené à se poser la question de la transmission (ceci a d’ailleurs amené à quelques échanges entre nous). Leur fille est très engagée, notamment dans une ONG. Leur fils est journaliste. Antoine a beaucoup privilégié la relation et l’éducation. Il sensibilise les gens à la spiritualité. Eveil à la bonté et à la beauté, particulièrement avec son petit-fils (Gustave) qu’il rencontre chaque jeudi après-midi.
François Hiss nous donne des nouvelles de la Province de France. Il y aura une Assemblée Provinciale à Villebon dans la semaine du 21 octobre. Ce sera l’occasion de faire un premier point sur la reconfiguration des deux anciennes provinces en une seule. Ce sera aussi l’occasion de sortir du caractère provisoire des normes qui ont été arrêtées lors de la fusion.
Jean Logean : le voici de retour après plusieurs années d’absence, pour notre plus grand plaisir ! Il nous donne quelques nouvelles de St Lazare et de l’EHPAD dans lequel il est très investi en rendant des visites aux uns et aux autres. Il nous rappelle également quelques expériences de sa vie dans la communauté.
Marc et Patricia Thieffry : La maison a reçu de nombreux visiteurs tout l’été. Patricia a fait de nombreux séjours à Chambéry pour des problèmes dentaires. Ils participent au jumelage franco-allemand de leur village. Marc nous parle de son dernier livre ‘Saint Vincent de Paul et la mission lazariste à Madagascar au XVIIème siècle’ paru chez L’Harmattan (au prix de 35 euros, faut bien faire un peu de pub !). Il reprend tout ce qu’on trouve aux archives concernant Madagascar (lettres de St Vincent, des missionnaires, les relations, les écrits des voyageurs de l’époque.
Aimé Goliet nous livre un certain nombre d’informations par rapport aux courriers des anciens qui n’ont pas pu venir.
Pierre Hugon est toujours dans la communauté de Vichy. Il aide les uns et les autres. Modeste, il préfère dire qu’il ne fait rien, « mais Aimé l’aide… » !
- Eucharistie
Lundi matin 11h. François Hiss préside l’Eucharistie et l’animation est assurée par Antoine et Dominique. C’est le temps durant lequel nous prierons notamment pour tous ceux qui n’ont pu être présents avec nous.
- Apéritif et repas
- Visite du musée
Après le repas, quelques-uns choisissent de faire la sieste tandis que les autres se rendent au musée pour une exposition sur des objets rapportés par des missionnaires et sur les dragons (n’y voyez aucun rapport de causes à effets). Les objets concernant les missionnaires proviennent de différents musées missionnaires de France.
Grand merci à Marie-Line, notre guide au musée, qui chaque année nous invite à de nouvelles découvertes !
Pour ceux qui seraient intéressés, au musée du Quai Branly, jusqu’au 01/01/19, il y a une exposition consacrée à Madagascar. Voir le site www.quaibranly.fr
Après la visite du musée, reprise du tour de table
Jean-Claude Sperandio remercie tout d’abord tous ceux qui lui ont témoigné leur amical soutien lors du décès de son gendre en janvier. Il note que la cérémonie des funérailles a été un bel exemple d’œcuménisme. Le couple ayant des liens avec la communauté protestante, le prêtre chargé des funérailles a organisé avec le pasteur local, son ami, une cérémonie associant catholiques et protestants. Le pasteur en habit de chœur fit la lecture des épitres et un petit sermon, et la chorale protestante assura les chants, complétés par les solos de musique des professeurs du Conservatoire. Il y avait plus de 500 personnes, dont on peut penser que peu d’entre elles étaient catholiques pratiquantes, mais ont pu apprécier cette cérémonie aussi apaisante qu’inhabituelle.
Depuis ce décès, la vie familiale a repris son cours. JC continue ses activités antérieures (familiales, universitaires, associatives, bricolages, etc.). Il s’est investi depuis l’an dernier, en animant des ateliers d’initiation par petits groupes, dans la lutte contre l’illectronisme (néologisme désignant le handicap social des personnes qui peinent à utiliser les moyens informatiques indispensables dans la société contemporaine, particulièrement internet). Cet été, il a visité la Communauté de Taizé en Bourgogne, près de Cluny. Séjour bref mais très enthousiasmant, dont le thème, ce week-end – là, portait sur le développement des liens entre l’islam et le christianisme. Grande animation, grande affluence de jeunes de divers pays !
Pierre et Carmen Damiens : Pierre est membre d’une association de retraités. Il y a une réunion tous les premiers lundis de chaque mois. Il travaille également à la banque alimentaire en qualité de bénévole. Pierre et Carmen nous parlent de leurs enfants, notamment dans le débat que nous avons eu sur la ‘transmission’.
Béatrice Garreau : L’an dernier, elle était déjà présente. Son mari, Luc, est décédé il y a six mois. Ils avaient perdu un bébé et elle précise que c’est le pire des malheurs pour un Malgache. A propos des personnes âgées, elle précise qu’à Madagascar il n’y a pas de maison de retraite, les anciens restent dans la famille. Béatrice nous remet un petit fascicule écrit par son époux qui relate une tranche de vie.
Lâm : (pour ceux qui ne le connaissent pas, il travaille aux archives de la Congrégation à St Lazare depuis 5 ans). Il nous livre ses impressions par rapport au groupe : Fidélité à Saint Vincent et à son message. Ce groupe est un espace de fidélité, de fraternité, de bonté, de tolérance. Il a pris sur ses congés pour venir ici. Dans cette rencontre, on reçoit, on donne, on écoute, on vit. Parfois il se dit que les anciens n’ont pas leur place ; or il y a une place pour tous. Nous avons besoin les uns des autres.
Dominique et Danielle LÊ ont fêté leurs 50 ans de mariage le 6 juillet dernier. Ils sont toujours très engagés dand leur paroisse (animation, chorale, catéchèse, animation des funérailles). Danielle continue à écrire des poèmes.
- Échanges divers
Quelques sujets ont fait l’objet de débats. En voici juste les thématiques : L’Église et la pédophilie, la transmission entre générations, la place des diacres et leur accueil difficile par certains prêtres, etc.
- Avenir du groupe
Ceci a été largement discuté. On se rend compte que le vieillissement et l’état de santé de beaucoup font que le nombre de participants diminue chaque année. Tous souhaitent que le groupe continue à se retrouver mais il serait sans doute important de pouvoir l’étoffer. La présence de Lâm est un signe. Firmin a également proposé d’inviter des confrères qui ont été dans la CM et qui ont quitté. Il est important pour ces personnes de pouvoir se retrouver dans un groupe. Tout le monde semble d’accord sur cette proposition.
LA PROCHAINE RENCONTRE DE VICHY EST PRÉVUE LES
13 et 14 octobre 2019
Texte : M. Marc THIEFFRY – Photos : P. Firmin MOLA MBALO, CM🔸
Tous souhaitent que le groupe continue à se retrouver mais il serait sans doute important de pouvoir l’étoffer.
Marc Thieffry
Les Lazaristes et Pierre Poivre, grands bâtisseurs de notre chrétienté
Les Lazaristes et Pierre Poivre, grands bâtisseurs de notre chrétienté
Pour vous les jeunes, dont un certain nombre se prépare activement à la grande célébration qui aura lieu au Thabor un dimanche de mai. Pour les moins jeunes aussi qui ont tout intérêt à savoir ce que nous Mauriciens devons à deux grands bâtisseurs de notre chrétienté ; voici une histoire qui mérite d’être connue.
En 1843, arrive le Père Laval et il y a eu, par la suite, quelque 220 prêtres et frères de la congrégation religieuse missionnaire nouvellement créée des Spiritains, qui sont venus donner un grand dynamisme à l’église catholique de notre pays.
En 1862, la congrégation des Pères Jésuites a commencé à nous envoyer des prêtres.
Avant eux toutefois, les premiers missionnaires qui sont venus travailler dans notre pays ont été les Lazaristes. Ils méritent d’être connus et reconnus.
L’autre bâtisseur, profondément croyant, qui avait la vision d’un pays riche de valeurs et d’honnêteté, est Pierre Poivre.
Les Lazaristes, premiers missionnaires de Maurice
Les Lazaristes appartiennent à une congrégation fondée en 1625 par Saint Vincent de Paul regroupant des prêtres et des frères. Ils sont appelés Lazaristes ou prêtres de Saint-Lazare, parce que c’était le nom du quartier où se trouvait leur maison à Paris. Le prêtre lazariste portait le titre « Monsieur » suivi de son nom de famille, et non celui de « Père », comme c’est le cas pour les autres prêtres.
En 1648, saint Vincent envoie des missionnaires à Madagascar. Ceux-ci doivent abandonner l’île en 1674, lors du massacre de Fort-Dauphin. Depuis, les Lazaristes ont toujours souhaité pouvoir y retourner et c’est dans ce but qu’ils acceptent de venir comme missionnaires dans les Mascareignes, pour accompagner les migrants français qui vont s’établir dans cette région du monde, cette nouvelle mission pouvant servir de base à cette reprise.
113 lazaristes en mission à Bourbon et à l’Isle de France
La plus ancienne et la plus importante colonie française dans l’océan Indien était alors l’Ile Bourbon, l’actuelle Ile de la Réunion. Dès 1712, un traité est signé entre la Compagnie des Indes et les Lazaristes pour qu’une mission soit fondée dans l’Ile Bourbon et les cinq premiers Lazaristes y arrivent finalement en 1714.
Quand en 1721, la Compagnie des Indes décide d’ouvrir une nouvelle colonie, l’Isle de France, qui est devenue notre Ile Maurice actuelle, 2 prêtres lazaristes et 2 frères lazaristes acceptent d’accompagner les colons pour le service spirituel dans cette nouvelle terre d’implantation des Français.
Le livre de Marc Thieffry, « Les Lazaristes aux Mascareignes aux XVIIIe et XIXe siècles dans Ile Bourbon (La Réunion) et Isle de France (Maurice) » publié en 2017 par les Éditions Harmattan, raconte en détail la présence et le travail des 113 lazaristes qui ont été missionnaires dans les deux îles que la Compagnie des Indes voulait exploiter.
« Ces missionnaires ont donné leur jeunesse, leurs rêves, leurs souffrances, leur vocation pour que vive la foi sur ces îles… » Ces deux îles étaient régies par un seul responsable qui portait le nom de Préfet apostolique, ayant les responsabilités de l’évêque actuel. Ce préfet résidait à Bourbon d’abord, puis est venu s’installer à l’Isle de France. Un vice-Préfet était responsable de l’autre île.
Les missionnaires lazaristes sont donc venus exercer leur ministère à l’Ile Bourbon qui était déjà habité par des Français venus s’établir dans l’île. En 1720, le voyage pour voguer entre les deux îles pouvait prendre 19 jours.
Les lazaristes dans l’Isle de France
Avant le départ des premiers Français de Lorient pour venir exploiter notre pays, le Père Général des Lazaristes et les dirigeants de la Compagnie des Indes avaient, d’un commun accord, divisé notre île en deux paroisses. Port Sud-Est, aussi connu comme Port-Bourbon, allait être dédié à Notre-Dame des Anges. L’autre paroisse, celle du Port Nord-Ouest, allait être mise sous le patronage de St. Louis IX, roi de France, d’où le nom de la capitale, Port-Louis.
Les premiers Lazaristes MM. Borthon et Daniel Igou, tous deux âgés de 43 ans et les frères Adam (26 ans) et Lecocq (29 ans) ont donc accompagné les colons, venus s’établir dans l’Isle de France.
Le 5 avril 1722 : Dimanche de Pâques, arrivent les premiers migrants au Port-Nord-Ouest sur le bateau, La Diane, après 9 mois d’une traversée longue et pleine de dangers, d’où l’importance pour les croyants d’être accompagnés de prêtres pour recevoir les sacrements et les aider à rester en relation avec Dieu.
Comme les Lazaristes débarquent avec les autres voyageurs au Port Nord-Ouest la paroisse Saint-Louis existe dès le premier jour, mais il n’y a aucun lieu de culte. L’autre paroisse est celle de Grand-Port: les bâtiments délabrés laissés par les Hollandais ont servi de chapelle.
Mgr Amédée Nagapen raconte dans son livre : « A la fin de 1723, l’île abritait 160 blancs, en 1725, 313, et vers 1730, un peu moins de 1 000. » C’est la présence des esclaves qui est venu gonfler la population. Vers 1730, ils étaient 648.
En 1735, arrive François Mahé de Labourdonnais comme gouverneur des deux îles – Bourbon et l’Isle de France. Il fait de Port-Louis, un port protégé et une capitale. Il encourage des Européens et des Indiens libres à se fixer dans l’île comme planteurs, soldats, artisans, ils sont 67 nouveaux immigrants qui ont obtenu des concessions de terre; ils introduisent dans le pays 504 esclaves pour travailler dans la culture et 87 esclaves pour travailler dans les familles.
En 1738 : 101 immigrants ont obtenu des concessions de terre avec 672 esclaves pour la culture, ce qui va constituer un total de 3946 habitants
8 septembre 1738 : Une première messe est célébrée aux Pamplemousses dans la case qui servait de logement, ce n’est qu’en 1740, que les missionnaires disposeront d’une petite chapelle.
Gabriel Igou, le fondateur de l’Église dans notre pays
Gabriel Igou a passé 42 ans dans nos îles. Ce prêtre prend tout de suite la charge du Port-Nord-Ouest. Il est donc le premier curé de la paroisse Saint-Louis. Il y reste 9 mois. Il part ensuite pour Bourbon (La Réunion) où durant 10 ans, il s’occupe de la paroisse de Port-Bourbon. En décembre 1733, il prend possession de la paroisse de Saint-Louis au Port-Louis. M. Igou a été le prêtre responsable de l’Isle de France durant 27 ans. « Tant que le vénérable M. Igou a pu agir, il valait seul dix ouvriers… En 1758, il est atteint de cécité et de paralysie. A présent, courbé sous le poids des années et privé de la vue, il n’a presque de mouvement que celui qui lui est donné. On le porte, les dimanches et fêtes, à l’église, pour la satisfaction et la consolation des insulaires. Ils croiraient avoir tout perdu s’ils ne le voyaient plus. Ils se plaisent à recueillir quelques paroles de vie que peut encore prononcer sa voix faible et mourante. Ils le regardent comme leur apôtre, et ont pour lui la même vénération que les fidèles d’Ephèse avaient pour Saint Jean. » Il est mort le 2 avril 1764.
Une pierre tombale avec une plaque portant le nom de Gabriel Igou, premier curé de la Cathédrale Saint-Louis, a été retrouvée le 3 novembre 2005 lors des fouilles. La pierre tombale, décrétée patrimoine national de l’Ile Maurice le 2 mai 2007, a intégré le 25 août 2007, la cour de la Cathédrale Saint Louis à Port-Louis.
Les paroisses de l’Isle de France
En 1764, il n’y a que 3 paroisses : Saint-Louis, de la ville du Port-Nord-Ouest, chef-lieu de la colonie, Saint-François des Pamplemousses et celle de Notre-Dame du Grand Port.
En 1767, Pierre Poivre écrit : « Il n’y a pas assez de prêtres dans l’île. L’instruction manque. Il faut une paroisse aux plaines de Wilhems, une au Flacq. Il en faudra, sous peu, une autre au sud de l’île où il reste beaucoup de concessions à faire… Cette île divisée en 8 quartiers principaux n’a encore que trois paroisses qui sont établies. Une dans chacun des deux ports, dont les deux églises tombent en ruine. La troisième au quartier des Pamplemousses, dont l’église n’est pas finie. Tout le reste de l’île est sans paroisse, et par conséquent sans culte public. Beaucoup d’habitants n’entendent la messe qu’une fois l’année; quelques-uns passent plusieurs années sans aucun exercice de religion. »
En 1770, 2 nouvelles paroisses sont établies.
La paroisse de Flacq prend le nom de St-Julien.
La paroisse de Moka est érigée. Le 19 août 1770 est posée la première pierre de l’église St-Jean.
En 1780, il n’y a que 33 510 habitants dans le pays.
En 1788, ils sont quelque 45 000, dont 4393 Blancs et 2 456 Gens libres.
Il n’y a plus, à l’hôpital, que trois sœurs d’une Communauté de Chartres. Elles ne paraissent pas contentes de leur sort parce qu’elles n’y ont plus aucune autorité. L’église paroissiale du Port Nord-Ouest tombe en ruines, elle est abandonnée; on fait les offices divins dans le bas d’un magasin de l’État, lieu malsain, indécent, trop petit.
Fin de la mission des Lazaristes à Maurice en 1808
Pierre Nicolas Boucher (1771-1808) est arrivé à l’Isle de France en 1776, a été curé de Pamplemousses et supérieur des missionnaires. Il est mort à Port-Louis le 16 octobre 1808. En 1805, il fait un triste constat de la situation dans le pays.
« La population de ces colonies est divisée en Noirs et Blancs. La population Noire est composée de Noirs Mozambiques, Malgaches, Indiens et Créoles…
Chacun raisonne de la religion à sa manière. Les plus mauvais livres sont ceux qu’on lit. Si par hasard, on va à l’église, c’est par cérémonie, par ton, curiosité ou besoin. Nous n’avons qu’un certain nombre de femmes qui approchent des sacrements, et il n’est pas grand.
Vous jugerez de là qu’il se commet dans le commerce beaucoup d’injustices, que le luxe et la volupté sont portés au comble; que les modes, les spectacles et les bals sont très recherchés; que les intrigues, les séparations, le divorce et l’usure ne sont pas rares et que la cupidité joue un grand rôle dans toutes les têtes. A les entendre, toutes les religions sont également bonnes et ils n’en professent aucune; les mariages se font sans piété, sans aucune préparation religieuse… Dans les campagnes, on vient à la messe que 3 ou 4 fois par an, en partie à cause de l’éloignement, en partie à cause de l’indifférence pour la religion… Jamais de prières ni d’instruction aux Noirs. Ces gens sont totalement abandonnés, on ne les instruit pas, le Code Noir n’est plus du tout suivi; on ne suit plus aucune règle; Noirs et Blancs vivent et meurent généralement sans sacrements. »
Un constat certes déprimant. En 1807, la population de la colonie s’élevait, selon le Baron d’Unienville, à 77 768 habitants seulement (la population de l’actuelle ville de Curepipe ou du district de Moka en l’an 2000). L’administration britannique promulguait la liberté religieuse mais le supérieur ecclésiastique devait être un sujet britannique. Quand Mgr. Slater, moine bénédictin anglophone, prend la responsabilité de son vaste vicariat apostolique, il ne reste que 6 prêtres lazaristes en fonction: ils sont soit morts dans le pays ou ont été rappelés en France.
Bref retour des Lazaristes à Maurice entre 1873 et 1880
Quand Mgr. Scarisbrick arrive dans son diocèse de Port-Louis, en 1872, il demande au supérieur des Lazaristes de lui envoyer des prêtres, surtout pour évangéliser les Chinois qui sont au nombre de 3 000. Quatre prêtres lazaristes ont été durant 7 ans en mission à Maurice.
Émile Joseph Navarre, prêtre lazariste, à qui est confiée la paroisse de St Vincent de Paul, à Pailles, s’est occupé de la mission auprès des Chinois établis dans le pays.
Julien Paillard a construit une église à trois nefs, toute en bois à Chamarel dont il avait été nommé curé en 1876.
Les derniers Lazaristes sont rentrés en France en 1880.
Monique DINAN 🔸
Ces missionnaires ont donné leur jeunesse, leurs rêves, leurs souffrances, leur vocation pour que vive la foi sur ces îles…
Explications :
Ce article est publié avec la collaboration de Marc Thieffry
Pour plus d’information vous pouvez visiter le site du journal : https://www.lemauricien.com/article/les-lazaristes-et-pierre-poivre-grands-batisseurs-de-notre-chretiente-i/