« Une joie inquiète » 3e dimanche de l’Avent C.
Homélie en la Chapelle saint Vincent de Paul à la Maison-Mère de Paris. 16 décembre 2018
Une joie inquiète… Je vais vous faire un aveu : j’ai été bien embarrassé pour préparer l’homélie d’aujourd’hui. Ce dimanche est traditionnellement celui de la joie. Toutes les lectures nous invitent à la joie parce que l’événement qu’elles annoncent n’est autre que la naissance du Fils de Dieu devenu homme comme nous dans ce monde, envoyé du Père pour nous sauver.
Et en face de cette annonce qui provoque notre joie, il y a les événements que nous vivons depuis quelques temps. Tout peut nous faire porter un regard pessimiste sur notre monde. Il y a toujours des points chauds sur notre planète ; souvent nous sentons la paix et le bonheur compromis par des dangers qui nous menacent. Les trois semaines passées nous inquiètent et nous révoltent sur certains aspects ; je veux parler des casses, des séditions, de l’attentat de Strasbourg. Je veux parler de l’inquiétude lancinante et des désespoirs de nos concitoyens qui n’ont pas de quoi boucler le mois. Nous demeurons inquiets.
En écoutant la prédication de Jean, les foules se posent deux questions :
1. Sur eux-mêmes : «que devons-nous faire ?» Le précurseur leur répond en leur adressant des exhortations morales précises. La même question est posée aux apôtres le jour de la Pentecôte par ceux qui ont entendu le discours de Pierre. Celui-ci les invite à croire en Jésus-Christ ressuscité, à la conversion et à un nouveau baptême (Ac 2, 37, 41).
2. Sur Jean-Baptiste lui-même : le gens se demandent si Jean n’est pas le Messie. Celui-ci leur répond : le Messie vient, plus puissant que lui. Il sera l’auteur du nouveau baptême. Le Précurseur annonce, avec des images fortes, l’Esprit qui va tomber sur toute l’humanité. C’est comme le travail du vanneur : toute la récolte y passe, mais Il est urgent de se préparer par la conversion à un tel jugement.
Dimanche de la joie, au cours de l’Avent, avant-goût de la fête de Noël ; tout nous y invite autour de nous. Mais la vraie joie est plus profonde : elle demeure toujours, au-delà même des inquiétudes et des drames ; sur les ronds-point ; elle s’approfondit davantage dans la prière.
Écoutons les auditeurs de Jean Baptiste : Que devons-nous faire ?
Là encore ma perplexité surgit. Que devons-nous faire ? Trois choses qui vont vous paraître dérisoires ou n’engageant peu.
1. La prière, la prière c’est ce dont nous manquons le moins. Prions pour la paix, la concorde, le remède vrai à la misère, prions pour les plus démunis, les vraiment démunis, ceux qui en ont “ras le bol”. Mais « Tu n’as plus à craindre le malheur » nous a dit Sophonie.
2. La confiance en la bonté de Dieu : « Que votre sérénité soit connue de tous les hommes». Le Seigneur nous invite à communiquer aux autres cette sérénité. Paul appelle sérénité cette joie profonde ; nous en avons besoin par les temps qui courent. C’est à la fois la modération, la maîtrise de soi, le souci du bien commun, qui naissent de notre confiance en Dieu et que rien ne peut ébranler. Cette joie calme est l’un des signes du chrétien.
3. Attendre le Christ dans la foi ; il nait pauvre dans une étable. Dire «l e Seigneur est proche », c’est nous préparer à accueillir notre Sauveur qui vient ; mais c’est aussi être attentif au frère qui est près de nous pour le reconnaître. Le prochain que nous devons aimer est celui qui est proche de nous, comme le Seigneur est proche parce qu’il est mêlé à l’histoire des hommes. « il est en toi » – «il est au milieu de nous», sur le rond-point. Dieu est à l’action pour nous. Comment le reconnaître dans ce monde qui nous inquiète ?
Le Seigneur est proche de nous parce qu’il est présent à notre vie de tous les jours. Seulement, les soucis quotidiens nous accaparent et nous empêchent de voir celui qui est près de nous. Comment aller au-delà de nos inquiétudes et de nos peurs pour être sensibles, dans la foi, à l’action et à la présence du Seigneur ?
L’Eucharistie est occasion de reconnaître le Seigneur présent et agissant au milieu de nous. C’est dans ce mouvement de reconnaissance que nous attendons et préparons la venue prochaine de notre Sauveur.
Nous dirons tout à l’heure dans la préface : « C’est lui qui nous donne la joie d’entrer déjà dans le mystère de Noël, pour qu’il nous trouve, quand il viendra, vigilants dans la prière et remplis d’allégresse » (Préface de l’Avent 2).
Claude LAUTISSIER, CM 🔸
Dimanche de la joie, au cours de l’Avent, avant-goût de la fête de Noël ; tout nous y invite autour de nous. Mais la vraie joie est plus profonde : elle demeure toujours, au-delà même des inquiétudes et des drames ; sur les ronds-point ; elle s’approfondit davantage dans la prière.