Lettre de Carême – 2017 – du Supérieur Général à tous les membres de la Congrégation de la Mission


LETTRE DE CARÊME

A tous les membres de la Congrégation de la Mission

Mes chers confrères,

La grâce et la paix de Jésus soient toujours avec nous !

Au début de cette lettre, je voudrais saisir l’occasion pour remercier chacun de vous de tout cœur pour vos nombreux vœux de Noël et du Nouvel An que j’ai reçus par poste, e-mail ou par les différents médias sociaux ! J’admire votre témoignage et votre service héroïques en des moments difficiles et dans des régions éloignées du globe. Mon cœur est avec chacun de vous, vous accompagnant tous les jours de mes pensées et de mes prières. Le temps du Carême est tout proche !

Dans la première lettre que je vous ai adressée en tant que Supérieur Général, en la fête de notre fondateur le 27 Septembre, j’ai commencé à réfléchir sur nos principales sources d’inspirations en plus de la sainte Bible : nos Règles Communes et nos Constitutions. La lettre de l’Avent en était un prolongement. Dans la lettre de Carême de cette année, j’aimerais continuer dans la même ligne, en réfléchissant sur les Règles Communes et les Constitutions. En fait, les Règles Communes et les Constitutions seront la base et la source de toutes les réflexions des lettres des temps forts liturgiques de l’Avent et du Carême, aussi bien que de la lettre pour la fête de notre Fondateur, durant les six prochaines années qui nous conduiront à notre Assemblée Générale de 2022.

Dans les deux précédentes lettres, j’exprimais le désir profond de mon cœur, encourageant et demandant à chaque membre de notre « Chétive Compagnie » d’embrasser nos Règles Communes et nos Constitutions comme un instrument indispensable pour le développement de notre vocation, pour notre chemin de sainteté, et pour la mission confiée à chacun de nous par Jésus, Evangélisateur des pauvres !

Voilà déjà cinq mois écoulés depuis la publication de la première lettre.

Vincent lui-même, à la fin des Règles Communes, demande à chacun de nous de les lire chaque trimestre. Nous avons à présent nos Constitutions, ainsi que nos Règles Communes. Comme je l’ai fait dans les deux dernières lettres, j’aimerais poser de nouveau à chacun de nous, dans cette lettre de Carême, les questions suivantes :

  • Est-ce que je porte avec moi mes Règles Communes et mes Constitutions ensemble avec ma Bible et mon Bréviaire ?
  • Comme je le fais avec ma Bible et mon Bréviaire, est-ce que je lis et médite un petit passage des Règles Communes ou des Constitutions chaque jour ?
  • Depuis la fête de Saint Vincent de Paul, il y a cinq mois de cela, est-ce que j’ai pu commencer une lecture priée et méditée des Règles Communes ou des Constitutions de façon à les terminer au bout d’un trimestre ?

Chers confrères, de tout mon cœur j’encourage chacun de nous à nous aider mutuellement à poursuivre ce chemin, ou à nous y réembarquer. Comme je l’ai fait dans ma lettre de l’Avent, j’aimerais une fois de plus encourager tous les Visiteurs, ainsi que les Supérieurs locaux, à être source d’inspiration, d’encouragement, et d’exemple pour leurs confrères tant au niveau local que provincial.

Si les réponses aux questions ci-dessus sont négatives, suis-je capable de m’interroger sur les raisons pour lesquelles je n’ai pas commencé les tâches mentionnées ci-dessus ? Pourquoi est-ce que je ne prends dans mes mains nos sources fondamentales d’inspiration pour suivre le charisme et la spiritualité de Saint Vincent ?

Etant donné que l’identité d’un missionnaire, d’un membre de la Congrégation de la Mission, est si importante pour notre mission, j’espère et je prie qu’il ne se trouve pas un seul confrère dans toute la Congrégation de la Mission qui ne lise et médite un petit passage de nos Règles Communes et de nos Constitutions personnellement ou en communauté chaque jour.

Dans ma lettre de l’Avent, j’ai médité sur « l’Incarnation » comme l’un des principaux mystères de la spiritualité de saint Vincent de Paul. Dans la lettre de Carême de cette année, je voudrais réfléchir avec vous sur le mystère de la « Sainte Trinité » comme un autre des principaux mystères de la spiritualité de saint Vincent.

Saint Vincent écrit dans les Règles communes :

Notre Congrégation étant obligée par la bulle de son érection d’honorer d’une façon toute particulière, les ineffables mystères de la Très Sainte Trinité et de l’Incarnation, nous tâcherons de nous acquitter de ce devoir avec très grand soin, et, si cela se peut, en toutes manières, mais principalement en faisant ces trois choses : 1° en produisant souvent du fond du cœur des actes de foi et de religion sur ces mystères ; 2° en offrant tous les jours à leur honneur quelques prières et bonnes œuvres, et particulièrement en célébrant leurs fêtes avec le plus de solennité et de dévotion qu’il nous sera possible ; 3° en nous étudiant soigneusement à faire, soit par nos instructions, soit par nos exemples, que les peuples les connaissent, les honorent, et les aient en grande vénération (Règles Communes X, 2).

Dans nos Constitutions, nous pouvons lire :

Témoins et messagers de l’amour de Dieu, nous devons témoigner une particulière dévotion et réserver un culte spécial aux mystères de la Trinité et de l’Incarnation (Constitutions IV, 48).

Quel est le message de la Sainte Trinité pour moi personnellement, pour la communauté où je vis et à laquelle j’appartiens, pour les personnes que Jésus m’envoie servir ?

Jésus nous aide à comprendre la Sainte Trinité : l’identité, la mission et le dessein du Père, du Fils et du Saint-Esprit. Jésus nous aide à comprendre la relation qui existe entre les trois Personnes, le lien intime qui les unit et l’influence de la Trinité sur chaque personne individuellement ainsi que sur la société dans son ensemble.

Au fur et à mesure que nous découvrons et développons, avec la grâce de Dieu, un lien indissoluble entre la Trinité et chaque personne, entre la Trinité et la communauté, entre la Trinité et l’humanité, nous nous rapprochons de plus en plus du modèle parfait de « relations » qui sont les composants fondamentaux de nos vies. Nous n’avons pas été créés comme des îles, séparées les unes des autres, mais comme des êtres sociaux et comme famille, de telle façon que, dans la profondeur de notre être, nous sommes un avec Dieu, c’est à dire avec la Trinité et entre nous.

La Trinité reste un mystère pour nous. Jésus nous a transmis ce que nous savons sur le Père, le Fils et l’Esprit. Jésus nous a présenté la Trinité comme le modèle parfait de « relations ».

Notre réflexion sur la Trinité doit être accompagnée par la volonté et l’objectif d’incarner ce modèle parfait de « relations » dans la situation de vie concrète dans laquelle je me trouve, dans la communauté où je vis et à laquelle j’appartiens, avec les personnes que Jésus m’envoie servir.

La Sainte Trinité est le modèle parfait de « relations » ! Jésus nous montre l’idéal.

  • La relation réciproque entre le Père et le Fils.
  • La relation réciproque entre le Père et l’Esprit.
  • La relation réciproque entre le Fils et l’Esprit.
  • La relation Père, Fils et Esprit.

Que pouvons-nous voir dans ces « relations » ?

  1. Nous pouvons voir que l’attention est toujours portée sur l’autre personne et non sur elle-même.
  2. Nous pouvons voir que la priorité est toujours accordée à l’autre et non à elle-même.
  3. Nous pouvons voir que la louange, la reconnaissance, l’admiration sont toujours offertes à l’autre personne et non à elle-même.
  4. Nous pouvons voir que chacune des trois Personnes de la Trinité exprime toujours la nécessité de collaboration avec l’autre pour remplir la mission.
  5. Nous pouvons voir que chacune des trois Personnes de la Trinité exprime toujours clairement qu’il serait insuffisant et inefficace pour chacune d’elle d’agir seule.

Que me dit le modèle des relations au sein de la Trinité sur ma propre vie dans :

  1. ma relation à Dieu,
  2. ma relation à la communauté,
  3. ma relation avec ceux que Jésus m’envoie servir ?

Parce que nous ne sommes pas des îles, mais que nous appartenons à la famille humaine, les « relations » sont une part inséparable de notre mission. Le modèle idéal de la Trinité que Jésus nous a laissé est le modèle à suivre.

Saint Vincent de Paul a fait du modèle idéal de la Sainte Trinité, l’un des fondements de sa spiritualité. En ce temps de Carême, nous sommes invités à avancer pour nous rapprocher du modèle parfait de « relations » que Jésus nous donne.

Si chacun de nous donne la priorité à l’autre, le place avant lui-même, avant ses propres désirs, avant ses propres intérêts, avant ses propres souhaits personnels ; si chacun fait attention à l’autre, partage du temps, des pensées, des expériences, des difficultés, des doutes, des souffrances, des joies, etc. en suivant le modèle parfait de « relations de la Trinité », alors quelqu’un fera de même pour chacun de nous. Ainsi prendra forme un ensemble merveilleux et miraculeux de relations où, ensemble, nous réaliserons la mission confiée par Jésus de la meilleure façon et le plus efficacement possible.Pour nous aider à méditer sur ce modèle parfait de « relations », utilisons deux autres passages de saint Vincent sur la Trinité, ainsi qu’une brève réflexion du Père Getúlio Mota Grossi, CM :

 » Etablissons-nous en cet esprit, si nous voulons avoir en nous l’image de l’adorable Trinité, si nous voulons avoir un saint rapport au Père, au Fils et au Saint-Esprit. Qu’est-ce qui fait l’unité et la comité en Dieu, si ce n’est l’égalité et la distinction des trois personnes ? Et qu’est-ce qui fait leur amour, si ce n’est leur ressemblance ? Et si l’amour n’était entre eux, qu’y aurait-il d’aimable ? dit le bienheureux évêque de Genève. L’uniformité est donc en la Sainte Trinité : ce que le Père veut, le Fils le veut ; ce que le Saint-Esprit fait, le Père et le Fils le font ; ils agissent de même ; ils n’ont qu’une même puissance et une même opération. Voilà l’origine de la perfection et notre modèle. Rendons-nous uniformes ; nous serons plusieurs comme si nous n’étions qu’un, et nous aurons la sainte union dans la pluralité. Si nous en avons déjà un peu, et non pas assez, demandons à Dieu ce qui nous manque, et voyons en quoi nous différons les uns des autres pour tâcher de nous ressembler tous et de nous égaler ; car la ressemblance et l’égalité engendrent l’amour, et l’amour tend à l’unité. Tâchons donc d’avoir tous les mêmes affections et un même agrément pour les choses qui se font, ou se laissent faire parmi nous (Conférence 206 du 23 mai 1659 De l’uniformité, Coste XII, 256-257).

Vivez ensemble comme n’ayant qu’un cœur et une âme (cf. Actes 4,32), afin que par cette union d’esprit vous soyez une véritable image de l’unité de Dieu, comme votre nombre représente les trois personnes de la très Sainte Trinité.

Je prie à cet effet le Saint-Esprit, qui est l’union du Père et du Fils, qu’il soit pareillement le vôtre, qu’il vous donne une profonde paix dans les contradictions et les difficultés, qui ne peuvent être que fréquentes autour des pauvres ; mais souvenez-vous aussi que c’est là votre croix, avec laquelle Notre-Seigneur vous appelle à lui et à son repos. Tout le monde estime votre emploi, et les gens de bien n’en reconnaissent pas sur la terre un plus honorable, ni plus saint, quand il est fait avec dévotion ». (Lettre du 30 juillet 1651 à Sœur Anne Hardemont, à Hennebont, Coste IV, 235-236).

La dévotion de saint Vincent à la Trinité n’était pas un exercice intellectuel mais une recherche de son cœur. Elle l’a conduit et nous conduit, comme Congrégation qui vit encore le charisme du fondateur, à une double expérience :

  • Imiter les relations entre les trois Personnes. Comme l’Eglise et dans l’Eglise, la Congrégation trouve dans la Trinité le principe suprême de son action et de sa vie (Constitutions II, 20). Nous sommes appelés à être une image de la Trinité, le Dieu d’Amour miséricordieux et compatissant (cf. Conférence 152 du 6 août [1656] Sur l’Esprit de Compassion et de Miséricorde, Coste XI, 340), le Dieu des pauvres, des petits, des plus faibles, à qui nous sommes destinés par notre charisme. Cela est vrai pour nous, pour les Filles de la Charité et pour toute la Famille vincentienne.

Appelés à l’union dans l’amour, l’uniformité dans la pluralité, la communion de vie, l’unité dans la diversité des dons, animés par l’Esprit Saint, envoyés comme Jésus pour la charité missionnaire et évangélisatrice des pauvres, un charisme inspiré par l’Esprit à Saint Vincent, donné à la Compagnie et dont nous sommes les héritiers, nous sommes invités à une fidélité créative au charisme, à la suite de Jésus, Evangélisateur des pauvres.

  • Par conséquent, notre dévotion à la Trinité, comme celle de saint Vincent, doit être reliée à la mission (cf. Conférence 118 du 23 mai 1655, répétition d’oraison, Coste XI, 180-182), à la proclamation du mystère de l’amour de Dieu pour les pauvres, pour leur salut (cf. ibid., 181). Le Verbe s’est incarné par amour, envoyé par le Père (cf. Jean 3,16), conçu par le Saint-Esprit (cf. Luc 1,35) dans le sein de Marie et consacré par le même Esprit pour apporter la Bonne Nouvelle aux pauvres. Dans le Verbe incarné, présent dans les pauvres, saint Vincent a vu la manifestation la plus parfaite de l’amour de Dieu (cf. Jean 3,16 ; 14,9), l’amour préférentiel du Dieu trinitaire pour les petits de ce monde (Getúlio Mota Grossi, CM).

Nous célébrons le 400e anniversaire du charisme de saint Vincent de Paul. Que cette année jubilaire nous apporte des fruits en abondance ! Avec une confiance totale en la Providence, par l’intercession de Notre Dame de la Médaille Miraculeuse, de saint Vincent de Paul et de tous les saints et bienheureux de la Famille vincentienne, nous poursuivons le chemin intérieur vers nous-mêmes, et extérieur vers nos communautés et les personnes que Jésus nous envoie servir, vers ceux qui ne connaissent peut-être pas encore le charisme ou vers ces endroits où le charisme n’a pas encore pris racine.

J’espère et je prie pour que les célébrations de la Semaine Sainte, de Pâques et du temps pascal de cette année apportent un surcroît de joie et de sens pour nous et notre mission tandis que nous méditons sur la Trinité et cheminons vers le modèle parfait de « relations ».

Continuons de prier les uns pour les autres !

Votre frère en saint Vincent,

Tomaž Mavrič, CM🔸

Notre réflexion sur la Trinité doit être accompagnée par la volonté et l’objectif d’incarner ce modèle parfait de « relations » dans la situation de vie concrète dans laquelle je me trouve, dans la communauté où je vis et à laquelle j’appartiens, avec les personnes que Jésus m’envoie servir.

Tomaž Mavrič, CM

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