Dieu est Miséricordieux
Lundi 14 novembre 2016 | de 9h à 16h45
Chers amis, chers frères et sœurs,
« Nous tous, chrétiens et musulmans, vivons sous le soleil d’un Dieu unique miséricordieux ».
Jean-Paul II à Kaduna au Nigéria en février 1992.
Il m’apparaissait difficilement concevable de terminer cette année jubilaire de la Miséricorde sans vivre une rencontre comme celle-ci, réunissant des croyants du judaïsme, du christianisme et de l’Islam. Chez chacun la Miséricorde tient une place importante ; elle dit quelque chose de Dieu et ne peut laisser indifférents l’homme. La Miséricorde fait partie de l’identité de Dieu.
Je remercie donc la commission de formation permanente d’avoir préparé cette journée que je nous souhaite riche et agréable, comme un temps fraternel qui en appellera d’autres. Je remercie particulièrement et chaleureusement nos invités d’avoir accepté de participer à cette rencontre et de nous partager quelque chose de leur foi. Se dire, se livrer dans ce qui constitue notre profondeur est une belle démarche humaine et spirituelle.
Je suis heureux de retrouver le P. Christophe Roucou qui a dirigé pendant 9 ans le service national pour les relations avec l’Islam au sein de la Conférence des Evêques de France. Je lui laisse le soin de se présenter.
Merci à vous tous d’être venus. Votre présence est un beau cadeau et une belle richesse. Je souhaite sincèrement que ce genre de rencontre entre nous, puisse se continuer ici ou ailleurs. Nous avons beaucoup à nous dire pour faire connaissance et avoir moins peur de l’autre.
Dans le monde et dans notre société, les évènements ne manquent pas où le vivre ensemble est secoué, blessé, meurtri et interrogé. Notre parole commune peut soigner, guérir ces liens qui sont ainsi fragilisés. Le dialogue lui-même est secoué : celui du quotidien et celui inter religieux qui demeure « une œuvre sans cesse à reprendre : lui seul nous permet de désarmer le fanatisme en nous et chez l’autre. C’est par lui que nous sommes appelés à exprimer notre foi en l’amour de Dieu qui aura le dernier mot sur toutes les puissances de division et de mort » ce que nous rappelle le P. Claverie, évêque d’Oran, assassiné il y a 20 ans. Il précise que le « dialogue doit commencer dans la vie par l’expérience de la rencontre parce que la vérité de l’homme est là où il souffre, là où il rit, là où il vit avec d’autres. » L’ignorance engendre la peur. Apprenons à regarder l’autre avec estime, curiosité bienveillante et le désir de marcher ensemble. Je me réjouis d’ailleurs de ce qui vit à différents endroits pour donner un vrai visage à la fraternité humaine et à celle entre croyants.
« Dans notre pèlerinage terrestre, nous ne sommes pas seuls : nous croisons le chemin d’autres fidèles, parfois nous partageons avec eux un bout de chemin, parfois nous vivons ensemble une étape qui nous donne du courage. Nous vivons une communication et un échange fraternels qui peuvent nous donner du réconfort et nous offrir de nouvelles forces pour affronter les défis communs qui se présentent à nous ».
Souvent on parle des autres avec des mots, des idées. Il faut avoir les personnes en face de soi, voir leur visage. Je pense aux migrants de Calais, déplacés à travers la France et qui ont provoqué des réactions parfois difficiles (mais c’est vrai que leur placement sur le territoire n’a pas été préparé) ; pourtant, quand ils sont arrivés dans les lieux de destinations, la population les a bien accueillis et s’implique à leur côté. Tout simplement parce qu’il ne s’agit plus d’idées mais de personnes concrètes. Ça change tout. C’est par là que passe l’humanité, qu’elle se reconnaît et s’accueille de part et d’autre.
Que cette journée nous donne courage pour nous apprécier, qu’elle nous donne du réconfort, qu’elle nous offre des forces neuves pour continuer le chemin ensemble et relever les défis de ce monde. En Algérie est né dans les années 90 le ‘Ribat el Salam’ (le lien de la Paix) ; n’y a t-il pas là un chemin à continuer ici ?
Bonne journée à tous.
Mot final :
Il est difficile de clôturer une telle journée, d’ailleurs je ne veux pas lui donner une conclusion car il n’y en a pas ; c’est davantage un envoi, tel qu’on vient de le voir sur ces images. C’est bien de cela qu’il s’agit. Je commencerai par dire que je regrette que le Rabin ne soit pas venu. C’est une voix qui a manqué et qui manque dans ce concert. Espérons et souhaitons l’entendre à un autre moment. Elle est nécessaire.
Je remercie les intervenants ; ils ont parlé avec leurs entrailles et ils ont fait remuer nos propres entrailles. Ils étaient passionnés et passionnants. La place du visage de l’autre, de la personne change notre regard et notre écoute. Les expériences entendues sont une parole incarnée et elles vérifient ce qu’on peut dire de la Miséricorde.
Je souligne ces points comme pouvant nous aider à repartir :
- être des pèlerins de la vérité
- êtres des révélateurs de sens, donner du sens
- être en visitation pour accueillir une parole nouvelle et donner une parole positive sur l’autre.
Durant la journée, j’ai pensé à Christian de Chergé et à l’échelle mystique, définissant la dimension spirituelle de chacun. On aurait pu parler de trépied aussi. Cette échelle a deux montants, bien enracinés en terre et qui s’élancent vers le ciel dans lequel ils s’enfoncent. Pour tenir et permettre de progresser dans cette montée, il y a besoin des barres transversales, des échelons. Ceux-ci nous aident à monter. Ils relient aussi les deux montants et leur donnent un équilibre, une assurance. Ces échelons ce sont ces actes, gestes posés par les jeunes entendus dans les témoignages, par les réfugiés ou migrants etc. c’est cela qui nous relient et nous font avancer pas à pas dans notre montée commune vers Dieu qui est, qui fonde notre unité.
Un envoi. Puissions-nous continuer ce partage à plusieurs voix et pourquoi pas, (encore un rêve) au moins une fois l’an. Pas forcément sous cette forme mais se retrouver pour une parole commune !
Bon retour à chacune et à chacun dans cette dynamique et merci encore de votre présence.
P. Christian MAUVAIS, cm, Visiteur de France🔸
La miséricorde, c’est l’acte ultime et suprême par lequel Dieu vient à notre rencontre.
Pape François
Textes en complément :
La miséricorde en islam une nécessité divine
Le testament du P. Christian de Chergé, prieur du monastère de Tibhirine