C’est à Ars, que presque 150 prêtres des diocèses d’Amiens, Beauvais, Chalon, Langres, Troyes, Reims et Soissons, se sont retrouvés avec leurs évêques, du 5 au 9 février 2024, pour travailler sur ce sujet sensible au sortir de la tempête de la révélation des abus sexuels, nombreux ayant été commis durant ce temps sacramentel, ou le sacrement ayant été le lieu d’emprise qui a conduit à ces situations. Ce sont alors l’approche biblique, l’approche historique, la réflexion autour des conclusions de la CIASE, et une approche liturgique qui vont nous faire revisiter le sacrement.
Bernard Massarini
La Formation « pardon-réconciliation » des prêtres de la région apostolique de Reims
C’est à Ars, que presque 150 prêtres des diocèses d’Amiens, Beauvais, Chalon, Langres, Troyes, Reims et Soissons, se sont retrouvés avec leurs évêques, du 5 au 9 février 2024, pour travailler sur ce sujet sensible au sortir de la tempête de la révélation des abus sexuels, nombreux ayant été commis durant ce temps sacramentel, ou le sacrement ayant été le lieu d’emprise qui a conduit à ces situations. Ce sont alors l’approche biblique, l’approche historique, la réflexion autour des conclusions de la CIASE, et une approche liturgique qui vont nous faire revisiter le sacrement.
Logés au foyer sacerdotal, au foyer la Providence ou au Foyer Benoit Joseph Labre, chacun prenant le petit déjeuner dans son lieu d’hébergement, nous nous retrouvions à 8h30 pour Laudes animées par des frères d’une région avec leur évêque. Ce sont eux qui assuraient l’animation de la célébration eucharistique et des Vêpres.
Les Laudes étaient suivies du commentaire d’un psaume pénitentiel par un des évêques de notre région (psaumes 50, 22, 129, 41 et 21). A 9h15, venait le temps des sessions suivis de temps de travail en groupe de 8 à 10. A 11h30 la messe suivie du repas pris au Foyer Jean-Paul II. L’après-midi reprenait à 14h30 jusque 18h. Une courte pause nous permettait de souffler avant le repas du soir à 19h20 et soirées libres jeux de société, ciné-club.
Seul le jeudi matin changera le rythme avec quatre ateliers : confession-direction spirituelle, vivre les temps de réconciliation aux divers âges de la vie, confession-exorcisme-guérison, les diverses célébrations. L’après-midi le curé recteur d’Ars nous a proposé une brève présentation de saint Jean-Marie Vianney, suivi d’un temps de silence avant que nous ne vivions un temps de célébration de la réconciliation.
Vendredi matin sera le temps d’évaluation par le témoignage de 4 évêques, puis une table ronde pour dire nos mercis et nos attentes. La messe de fin de session se déroulera dans la basilique avant le mot de clôture du président de la région, aussi président de la Conférence des évêques de France.
Tous reprendront la direction du Foyer Jean-Paul II, pour le repas, dernier temps de la session avant la reprise de la route par les uns et les autres.
L’approche biblique par le Père Éric Morin professeur de l’Ecole Cathédrale nous a rappelé la place de la démarche de réconciliation dans la première et la seconde alliance. Deux choses ont retenu mon attention. Le pardon avant d’être une démarche de retour, de conversion est au sens fort « une remise en état de grâce » du pénitent. Péché c’est manquer à l’Alliance avant d’être considération de pur et d’impur (notions qui ont à voir avec la pratique cultuelle et pas morale). Le célèbre passage de Mt 16, utilisé pour parler du pouvoir des clefs remis à l’Eglise dans le sacrement de réconciliation doit être replacé dans le contexte de la première alliance où il s’agissait non pas de remettre les fautes, mais de lier des frères à la promesse et de les délier de ce qui en éloigne. Nous savons cependant que l’Eglise au XIIème l’a lu comme pouvoir d’exclusion : le pape seul pouvant lever certains interdits.
Le frère Isaïa Gazzola, professeur à l’Institut Catholique de Paris, nous présentera le pardon comme une dimension permanente de l’histoire de la vie croyante. Dans les premiers siècles : la pénitence est publique et elle pense la réintégration au peuple de croyants ceux qui ont renié leur foi. Pénitence publique, elle va devenir trop lourde entrainant des condamnations à plusieurs années avant la réintégration publique, ce qui conduira aux baptêmes à l’article de la mort pour éviter ce type de condamnation. Progressivement, la discipline monastique va nous faire évoluer vers la pénitence tarifée. Plus tard, avec le Concile de Trente, elle va devenir pénitence individuelle dont seul le prêtre, après l’aveu, a pouvoir de libérer des conséquences de la faute. Le Concile Vatican II va repositionner le pardon comme acte privé et communautaire, invitant à être inventifs dans la façon de célébrer le pardon.
Mme Ségolène MOOG, de la cellule permanente de lutte contre la pédophilie, va nous rappeler que c’est cet espace qui a été le lieu des crimes de pédophilies ou celui qui les a induit. Le rapport de la CIASE a été prolongé par des groupes de travail qui ont produit des textes : rappelant le secret absolu de la confession et le secret professionnel de l’accompagnement spirituel. Secret qui peut être levé, si l’écoutant l’estime nécessaire pour le bien de l’écouté, sans ce que soit pour lui une obligation légale.
Mgr VETÖ va nous déployer la richesse du rituel de sacrement de pardon nous rappelant que nous pouvons toujours être inventifs pour faire que la Parole de Dieu innerve sa célébration et que soit justement replacé l’aveu comme seulement un élément de la démarche que la contrition, par l’aveu accompli, cette démarche étant couronnée par la pénitence (l’authentification par la réparation exécutée par le pénitent).
Les ateliers vont aborder les questions du lien entre réconciliation guérison et exorcisme, celles des pratiques communautaires et individuelles de la célébration qui sont à retrouver, le lien entre accompagnement spirituel et confession, et l’initiation que nous sommes invités à proposer. Les ministres du sacrement seront inventifs pour proposer cette démarche comme une dimension ordinaire de la vie du croyant.
A l’issue de l’eucharistie célébrée à la basilique, Monseigneur de MOULIN-BEAUFORT, évêque président de la région, a conclu notre rencontre disant que la Bonne Nouvelle n’est pas qu’il y ait des pécheurs, mais des pénitents : des personnes qui croient à l‘amour de Dieu. La Bonne nouvelle c’est que le péché n’a pas le dernier mot de notre histoire et que le pardon est le cœur de Dieu. Ce sacrement nous replace au cœur de l’Alliance. S’il se situe au creux du combat de l’âme, aidant à apaiser les passions, il est avant tout la reconnaissance que le péché, avant d’être affaire d’impureté, est affaire d’offense à Dieu, et il proclame que Dieu l’efface.
Ministres du sacrement nous aurons un infini respect du pénitent, nous rappelant qu’accueillant le visage du frère pécheur, nous recevons le visage de son ange. A une époque où le psychologique se loge dans tous les recoins de l’existence, nous saurons porter nos sœurs et nos frères qui viennent se réconcilier avec Dieu, et avec eux célèbrerons la joie qu’ils ont de retrouver leur identité de filles et fils bien-aimés.
Bernard Massarini c.m.