Qu’en est-il pour nous, aujourd’hui ? ces deux conversions ne renvoient-elles pas chacun d’entre nous à vivre une même démarche, faite d’admiration, d’émerveillement et en même temps de stupeur, qui nous réajuste dans notre vocation...

Homélie 25 janvier 2020. Chapelle Saint Vincent de Paul – Paris

A la fin de ces deux jours de session de formation permanente, il est bon de nous retrouver en ce lieu pour nous poser simplement en nous mettant à l’écoute de la Parole de Dieu qui met devant nos yeux deux témoins :

Paul combattant les chrétiens et rencontrant le Christ d’une manière fulgurante sur sa route; événement par lequel il est choisi pour être, ‘devant tous les hommes, le témoin de ce qu’il a vu et entendu.’

Vincent écoutant la confession d’un mourant et exhortant les habitants à faire une confession générale ; événement par lequel ‘Dieu donna commencement à la Congrégation de la Mission’ (XI,2), ‘ce qu’Il ne fit pas sans dessein en ce jour-là’ qui est celui de la Conversion de st Paul.

Paul et Vincent ont vécu chacun, un événement fort, unique, pas forcément instantané, qui les a renversés, retournés intérieurement, et du coup préparés à vivre la Mission auprès de l’ensemble des nations dans le monde, ou auprès des habitants sur l’ensemble des territoires de la famille De Gondi. Un événement de part et d’autre, qui ouvre à d’autres horizons, qui élargit le regard et l’engagement, qui donne priorité à ceux qui sont au loin. Un événement qui donne sens à la Mission, à la nôtre, à la suite du Christ.

Cet événement sur la route de Damas ou chez l’homme de Gannes, Paul et Vincent l’ont relu pour en déchiffrer le sens, le contenu, l’appel ; ils l’ont relu et partagé (Ac 22/3-16 ; XI,2 ; XII, 7-8) ; ils disent tous les deux comment ils ont été aidés par une présence :

  • d’abord celle des compagnons de Paul qui l’accompagnent à Damas et celle de Madame de Gondi qui demande une prédication circonstanciée.
  • ensuite celle d’Ananie qui ouvre à la dimension de la fraternité et qui révèle le projet de Dieu sur Paul : et il y a celle des jésuites qui apportent leur soutien et qui révèlent la force de la collaboration, de la collégialité ;

Ces présences ont été essentielles pour une prise de conscience de la mission à vivre dorénavant différemment. Nous y décelons la présence de l’Esprit Saint, qui nous pousse et nous porte ; Il nous devance dans la mission : ‘Quand  vous arrivez quelque part , vous vous rendez compte qu’il est arrivé avant vous et qu’il vous attend’ !

Qu’en est-il pour nous, aujourd’hui ? ces deux conversions ne renvoient-elles pas chacun d’entre nous à vivre une même démarche, faite d’admiration, d’émerveillement et en même temps de stupeur, qui nous réajuste dans notre vocation :

  • à savoir celle de la confession pour y rencontrer Jésus comme nous y invite le P. Général, selon nos Constitutions qui nous encouragent à recourir souvent au sacrement de la Réconciliation « pour être à même de nous assurer une constante conversion et la fidélité à notre vocation » (C 45 §2)
  • à savoir celle de nous laisser bousculer par la Parole de Dieu pour entrer dans une meilleure connaissance du Christ, 1er missionnaire envoyé pour le salut de tous ? parole qui nous fait sortir de nos chemins, de nos fonctionnements habituels et qui nous ouvre à d’autres réalités humaines ?

Demain, ce sera le dimanche de la Parole, institué par le Pape François. Cette insistance n’est pas neutre pour la mission. Chacun sent le besoin d’entrer dans l’intelligence des Ecritures, de les comprendre de l’intérieur, de s’en nourrir. Prendre le temps personnellement et en communauté pour accueillir et ruminer la Parole qui nous engendre comme disciple et comme missionnaire, qui nous apprend à connaître le corps dans lequel nous sommes et à faire corps avec les frères et sœurs vers qui nous sommes envoyés ou qui nous sont donnés.

C’est aussi une invitation à relire ensemble les évènements qui marquent nos vies de missionnaires pour en discerner le sens, en accueillir les appels, les priorités qui peuvent en sortir ;  pour devenir à notre tour témoin de ce que nous avons vu et entendu ; c’est une bonne chose que cette écoute de la Parole soit partagée en communauté car elle interroge celle-ci dans son ensemble par rapport à la mission. Il s’agit du partage de foi recommandé par nos Constitutions (C 46) qui insistent pour que, dans une atmosphère de prière ‘nous partagions en un dialogue fraternel entre nous notre expérience spirituelle et apostolique’. La communauté trouve là, dans ce partage, son unité et son envoi en mission pour y vivre la Charité, selon ce que nous rappelle François :

« Écouter les saintes Ecritures pour pratiquer la miséricorde, c’est un grand défi pour notre vie. La parole de Dieu est en mesure d’ouvrir nos yeux pour nous permettre de sortir de l’individualisme qui conduit à l’asphyxie et à la stérilité tout en ouvrant grand la voie du partage et de la solidarité » (Aperuit Illis, 13)

Jésus nous attire à lui pour mieux nous envoyer et faire le bien là où nous passons. Il nous faut toujours revenir à lui, à cette source, à son point de jaillissement pour mieux repartir.

« Nous avons un besoin urgent de devenir familiers et intimes de l’Écriture sainte et du Ressuscité, qui ne cesse de rompre la Parole et le Pain dans la communauté des croyants ». (Aperuit Illis, 18).

Je vous renvoie aux projets communautaires qui précisent ces temps où vous pouvez le vivre ensemble.

Ces derniers temps, nous avons perdu trois missionnaires, qui n’ont pas fait grand bruit mais qui se sont donnés entièrement : P. Christian LABOURSE, missionnaire dans le Sud-Ouest, le P. Pierre HUGON à Madagascar et P. Jean PLANCQ, missionnaire itinérant. Confions-nous à eux, qu’ils intercèdent pour nous auprès de Paul et de Vincent pour nous aider à nous situer les uns et les autres face à la Parole de Dieu qui seule nous constitue missionnaires, nous guérissant et renouvelant dans sa miséricorde.

Amen !