Fidèles à la volonté de saint Vincent, nous vivons en communion fraternelle - comme les Apôtres avec le Christ - formant une communauté de travail, de prière et de biens destinée à favoriser le progrès de notre apostolat et notre propre épanouissement !
Claude Lautissier
Saint Vincent de Paul et la communauté (I – II)
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Saint Vincent de Paul et la communauté (I – II)
Le père Claude LAUTISSIER, directeur des Archives de la Congrégation de la Mission à la Maison-Mère de Paris, nous offre un article (numérisé) du père Jean Morin autour des origines de la « communauté » telle que saint Vincent de Paul l’a conçue pour les confrères de son temps et que nous pouvons relire à la lumière de notre expérience actuelle. Notre vie en commun destinée à la Mission le père Morin n’arrête pas de nous le dire ! Bonne lecture de ces deux premières parties.
Fidèles à la volonté de saint Vincent, nous vivons en communion fraternelle – comme les Apôtres avec le Christ – formant une communauté de travail, de prière et de biens destinée à favoriser le progrès de notre apostolat et notre propre épanouissement ! (Constitutions, 29).
Dans ce texte, le fait, la finalité et les niveaux de la vie communautaire, dans la Mission, sont présentés comme une fidélité « à la volonté de saint Vincent »
Mais les réalités et les exigences de la Pastorale d’aujourd’hui semblent bien souvent, remettre en cause sinon le fait du moins les modalités de notre vie de Communauté. Et on souhaiterait interpréter ce n. 29 des Constitutions à la lumière du n. 18 qui, à propos de l’Activité Apostolique, précise :
- A l’occasion nous n’hésiterons pas à frayer des voies nouvelles, plus en harmonie avec les situations concrètes et changeantes des personnes et des choses.
- Cette recherche et, éventuellement, ces « voies nouvelles » devront cependant toujours s’inspirer d’une fidélité à la volonté de saint Vincent ; et c’est pourquoi un essai sur « Saint Vincent et la Communauté » peut avoir, aujourd’hui, son utilité.
- Au cours de cette étude, nous tenterons de suivre les expériences successives et progressives de saint Vincent de Paul, en matière de Communauté. Peut-être comprendrons-nous mieux ainsi la pensée qu’il nous livre dans ses Entretiens comme aussi la fidélité qui nous est demandée dans la Mission d’aujourd’hui.
I. LES ANTÉCÉDENTS
Avant d’en venir aux premières réalisations « communautaires » d’après 1617, il est sans doute utile de mentionner quelques antécédents plus ou moins directement en rapport avec l’idée que, plus tard, saint Vincent se fit de la Communauté.
1. La Communauté … « une famille »
Très souvent et spontanément saint Vincent emploie, pour parler de la vie de communauté, des termes et expressions empruntés à la vie de famille. Cela ne lui est évidemment pas propre mais mérite d’être noté. Parlant, par exemple, de leur communauté locale lorsqu’ il écrit aux supérieurs, il emploie souvent le mot « famille » :
« Monsieur Dufestel et sa famille de Troyes … » (I, 538) – « J’embrasse avec tendresse toute votre famille … » (I, 445) [1]
Des remarques pourraient être faites au sujet des Confréries et des Filles de la Charité. Faut-il chercher dans l’expérience et les souvenirs de famille de saint Vincent les racines profondes et inconscientes de cette relation, que si fréquemment et spontanément il établit entre Communauté et Famille ? Aux historiens et aux psychologues de se prononcer. Ce que l’on sait, en tout cas, de la famille et do l’enfance de saint Vincent nous permet de supposer qu’il en conservait un souvenir heureux malgré la rudesse de la vie qu’il y connut.
2. La Communauté … Moyen de « perfection sacerdotale»
Au cours de ses deux premières expériences de Communauté, il semble bien que saint Vincent ait d’abord perçu la Communauté comme un moyen de perfection :
a) L’expérience Oratorienne (1611-12)
En 1611-1612, saint Vincent a eu l’occasion d’expérimenter une certaine vie commune avec les premiers Oratoriens. Abelly l’affirme (1664 ; I, 6, 24). Il croit même pouvoir préciser « qu’il demeura environ deux ans en cette retraite ».
On sait peu de choses sur cette communauté des premiers Oratoriens et, en fait, pratiquement rien sur la durée et les modalités du séjour qu’y fit saint Vincent. Il semble probable qu’au cours de cette période la Communauté lui apparut d’abord comme un moyen de perfection et sanctification sacerdotale. C’était l’optique de Bérulle qui disait à ses premiers disciples :
« … Le même Dieu qui a rétabli en nos jours, en plusieurs familles religieuses, l’esprit et la ferveur de leur première institution, semble vouloir aussi départir la même grâce et faveur à l’état de prêtrise qui est le premier, le plus essentiel et nécessaire à son Église et renouveler en icelui l’état et la perfection qui lui convient selon son ancien usage et sa première institution. Et c’est pour recueillir cette grâce du ciel … que nous sommes assemblés en ce lieu et en cette forme de vie qui se commence … » (Migne, 1270)
Communauté, moyen de perfection Sacerdotale ; il semble bien que ce soit d’abord sous cet angle que saint Vincent vécut sa courte expérience Oratorienne sous la direction de Bérulle.
b) L’expérience de Châtillon (1617)
Dans l’un des documents du procès de béatification de saint Vincent se trouve « Le rapport de Charles Démia sur le séjour de saint Vincent à Châtillon-les-Dombes » (XIII, 45-54). On y apprend qu’à son arrivée, six vieux prêtres sociétaires y vivaient dans un grand libertinage. Secondé par Monsieur Louis Girard, son vicaire et futur successeur, « Monsieur Vincent apporta un notable changement, tant en leurs actions qu’en leurs mœurs ; et ce fut par une façon de faire bien singulière… Il les porta à vivre en commun et empêcha que les biens d’Église ne se dissipassent … ».
Notons donc cet essai de « Vie en commun » suggéré et réalisé par saint Vincent et remarquons que le contexte semble bien indiquer que cette vie en commun est, ici [48] encore, considérée d’abord comme un moyen efficace de soutient et de Perfection des prêtres. Cc qui paraît toujours bien dans la ligne bérullienne.
3. La Communauté … moyen apostolique : « les Confréries »
Peut-on parler « d’expériences communautaires » à propos des Confréries de la Charité ? Le mot, en tous cas, est employé par saint Vincent lui-même dans les Règlements (XIII, 430).
Les Confréries de la Charité constituent, on le sait, « la toute première » fondation vincentienne. Et – pour nous en tenir ici à l’année 1617 – l’Acte de fondation (XIV, 125-126) et le Premier Règlement (XIII, 423-439) de la Confrérie de Châtillon révèlent peut-être déjà une importante évolution dans la pensée et l’expérience de saint Vincent, concernant la « Communauté ». La lecture de ces deux textes suggère, en effet, plusieurs remarques :
a) le caractère et la finalité nettement apostolique de l’Institution
Jusqu’alors, on l’a vu, saint Vincent semble avoir abordé « la Communauté « comme d’abord un moyen de Perfection. Cette fois, il s’agit clairement et d’abord d’un moyen de meilleur service. « Les Dames sous-nommées se sont charitablement associées pour assister les pauvres malades » (XIV, 425). Et l’on retrouve pratiquement la même formule dans chacun des Règlements. On se met ensemble pour assister les Pauvres. On retrouvera une formule analogue dans le Premier Contrat d’Association de la Mission du 4 septembre 1626 : « quelques ecclésiastiques qui se lient et s’unissent ensemble pour s’employer, en matière de mission, à catéchiser, prêcher… » (XIII, 204)
b) la notion d’ordre pour un meilleur service
C’est certainement là l’un des « leviers » de la pensée de saint Vincent concernant l’Institution « communautaire » de la Confrérie de Châtillon. Il faut se mettre ensemble pour assurer un service plus efficace et mieux reparti. L’introduction (très intéressante !) du Règlement (XIII, 423) remarque que les pauvres » ont parfois beaucoup souffert, plutôt pour faire d’ordre à les soulager que de personnes charitables. « Nous avons sans doute là l’écho de cc diagnostic, typiquement vincentien, qu’Abelly prête à saint Vincent au soir de l’événement de Châtillon : « Voilà une grande Charité … mais celle-ci n’est-pas-bien réglée ». (Abelly, 1664, I, 10, 46). La Confrérie sera donc moyen d’un service ordonné, bien réglé.
c) la notion de durée pour un meilleur service
La Confrérie établie et organisée « par ensemble » sera également un moyen et une garantie ; de durée au service des pauvres. « … Mais, parce qu’il est à craindre qu’ayant commencé ce bon œuvre, il ne dépérisse dans peu de temps, si, pour le maintenir, elles n’ont quelque union et liaison spirituelle ensemble, elles sont disposées à se joindre en un corps… » (XIII, 423). L’union et liaison spirituelle ensemble est ici nettement présentée comme le moyen d’assurer la durée pour le service des pauvres.
C’est là encore un aspect que l’on retrouvera souvent concernant la Communauté selon saint Vincent (I, 58 ; III, 56). Dans et pour le service, « quelqu’union et liaison spirituelle ENSEMBLE » est moyen et garantie de durée et de persévérance.
d) On peut enfin noter le caractère « séculier » et « paroissial » de cette première Institution vincentienne qui aura également quelque retentissement- dans la suite.
Connaissant le prix que donnait saint Vincent à l’expérience, on peut facilement supposer que « les antécédents » que nous venons d’évoquer ont eu leur place et leur influence dans le cheminement de la pensée de saint Vincent concernant la Communauté, en générale et la Communauté de la Mission en particulier. Nous aurons sans doute l’occasion de le remarquer dans la suite. [49].
II. LA NÉCESSITÉ D’UNE COMMUNAUTÉ : (1617-1625)
Les documents et témoignages sur cette période (1617-1625) sont rares. Nous n’avons pratiquement que les souvenirs évoqués, longtemps après, par saint Vincent lui-même au cours de ses Entretiens. Une lecture attentive do ces quelques textes pout, cependant, nous donner une idée du cheminement qui – au rythme même des missions – aboutit à la fondation de la première Communauté de la Mission.
1. …. « Ne pouvant plus y suffire… » (XI, 4-5)
Tout est donc parti de l’évènement Gannes-Folleville: la confession, suivie 10 25 janvier 1617 de la prédication … « et toutes ces bonnes gens furent si touchées de Dieu qu’ils venaient tous pour faire leur confession générale. Je continuai de les instruire et de les disposer aux sacrements et commençai de les entendre. Mais la presse fut si grande que, NE pouvant plus y suffire, avec un autre prêtre qui m’aidait, Madame envoya prier les Révérends Pères Jésuites d’Amiens de venir au secours ; elle en écrivit au R.P. Recteur qui y vint lui-même et, n’ayant eu le loisir d’y arrêter que fort peu de temps, il envoya pour y travailler en sa place le R.P. Fourché, de sa même Compagnie, lequel nous aida à confesser, prêcher et catéchiser, et trouva, par la miséricorde de Dieu de quoi s’occuper. Nous fûmes ensuite aux autres villages … et nous fîmes comme au premier.
De ce premier témoignage, il ressort que cette toute première mission révéla d’emblée à saint Vincent le besoin, la nécessité d’être aidé, d’être plusieurs pour faire face à « la presse ». Cette constatation toute simple et concrète a son importance : Dès Folleville, la Mission se révèle disproportionnée au travail d’un seul. L’expérience faisant son chemin, on verra dans le Contrat de 1625 que fondateurs et Monsieur Vincent semblent s’être mis d’accord sur le nombre de six missionnaires, dans la mesure bien sûr où la Mission se cantonne sur les terres des de Gondi.
2….. « L’on pense aux MOYENS » … (XI, 170-171)
Le deuxième témoignage, sur cette période 1617-1625, est un peu plus explicite sur l’après-Folleville. Après avoir dit qu’il fallut faire appel aux PP. Jésuites, saint Vincent poursuit : « Ensuite, voyant que cela réussissait, on pensa aux moyens de « faire que de temps en temps – l’on allât sur les terres de madite dame pour y faire mission. Je fus chargé d’en parler aux PP. Jésuites pour les prier d’accepter cette fondation. Je m’adressai au R.P. Charlet. Mais ils me firent réponse qu’ils ne pouvaient point accepter cette fondation et que cela était contraire à leur Institut ; de sorte que, comme l’on vit cela et qu’on ne trouvait personne qui se voulut charger de faire ces missions, on résolut d’associer quelques bons prêtres… »
Cc deuxième témoignage suppose une période de réflexion, recherche et démarche. Dès Folleville s’est imposé la nécessité d’être plusieurs. Après plusieurs missions, une autre nécessité apparaît : celle de la stabilité des missionnaires et d’une certaine spécialisation pour les Missions. C’est que le ministère « occasionnel » des missions tend lui-même à s’organiser et se stabiliser ; « on pensa aux moyens de faire que, de temps en temps, l’on allât … pour y faire mission ». Et c’est tout naturellement qu’on en vient à l’idée de fondation.
Il semble donc bien que, chez saint Vincent, l’idée même de Communauté surgi des exigences de la Mission, des réalités concrètes du travail. (Il faut être plusieurs ; il faut être stables et tout donnés aux missions.) [50]
3.… « Monsieur Portail et moi » … (XII, 1-8)
Le troisième témoignage de saint Vincent, sur la période 1611-1625, donne quelques lumières sur la phase précédant immédiatement le Contrat de Fondation. Rappelant la prédication de Folleville, le succès, l’intervention de deux Pères Jésuites, il poursuit :
« … ce qui fut cause qu’on continua le même exercice dans les autres paroisses de madite Dame durant plusieurs années, laquelle enfin voulut entretenir des prêtres pour continuer des missions et nous fit avoir à cet effet le Collège des Bons-Enfants, où nous nous retirâmes, M. Portail et moi, et prîmes avec nous un bon prêtre, à qui nous donnions 50 écus par an. Nous nous en allions ainsi tous les trois prêcher et faire la mission de village en village. En partant, nous donnions la clef à quelqu’un des voisins, ou nous-même nous les priions d’aller coucher la nuit dans la maison… »
Selon ce texte, l’équipe « Apostolique » composée de saint Vincent et de deux Pères Jésuites semble avoir fonctionné « durant plusieurs années », jusqu’à la constitution de la petite communauté des Bons-Enfants. Le passage de la collaboration « occasionnelle » des PP. Jésuites à la Communauté missionnaire (à plein temps) du Collège des Bons-Enfants est, sans doute, très important et constitue le dernier maillon avant la Fondation. L’acquisition du Collège des Bons-Enfants date du 6 mars 1624 ; on verra que saint Vincent lui-même ne pût y séjourner avant la fin de 1625, mais pendant un an la petite communauté missionnaire pourra expérimenter le « style de vie » qui sera retenu dans le contrat de fondation.
4. … « s’appliqueront entièrement au soin dudit pauvre peuple »…
Le Contrat de Fondation est signé le 11 avril 1625 (XIII, 197-202). Il est facile de retrouver, dans ce texte, l’écho et les conclusions des expériences que nous venons d’évoquer.
a) Le caractère nettement et prioritairement apostolique de la Communauté.
« …quelques ecclésiastiques de doctrine, piété et capacités connues qui voulussent renoncer POUR s’appliquer entièrement et purement au salut du pauvre peuple, allant de village en village… » et Monsieur Vincent est chargé d’élire et choisir, dans l’année, six personnes ecclésiastiques, ou tel nombre que le revenu de la présente fondation en pourra porter… pour travailler audit œuvre… »
La Communauté apparaît bien comme le moyen d’assurer la Mission.
b) La disponibilité missionnaire des personnes et de la Communauté est fermement soulignée
On a remarqué les deux adverbes « entièrement et purement ». C’est là, sans doute l’écho des difficultés et insuffisances perçues au cours des huit années précédentes, lorsque saint Vincent devait faire appel à des aides « occasionnels ». Cette stabilité (qui demeurera, on le sait, un souci majeur de saint Vincent) et cette entière disponibilité paraissent tellement essentielles à la Mission qu’une série de mesures concrètes et exigeantes sont prévues. Il faudra renoncer expressément à toutes charges, bénéfices et dignités et s’obliger » de ne prêcher ni administrer aucun sacrement ès-ville dans lesquelles il y aura archevêché, évêché ou présidial ». Curieusement, et toujours dans le même souci, il est précisé : « …à la réserve néanmoins qu’avenant que quelque prélat ou patron désirât conférer quelque cure à l’un d’entre eux pour le bien administrer, celui qui lui serait présenté par ledit directeur ou supérieur la pourrait accepter et exercer, ayant préalablement servi huit ou dix ans audit œuvre et non autrement, si ce n’est que le supérieur, de l’avis de la Compagnie, jugeât convenable de dispenser quelqu’un dudit service de huit ans. » Ces huit ans-minimum au service de la Mission exprime bien le souci, souci de stabilité et disponibilité né des exigences mêmes de la Mission. [51]
c) L’expression « vivre en commun » est employée dans le Contrat, et on la retrouvera pratiquement dans toutes les pièces officielles par la suite
« … Lesdits prêtres vivront en commun sous l’obéissance dudit sieur de Paul, en la manière susdite, et de leur supérieur à l’avenir après son décès, sous le nom de Compagnie, Congrégation ou Confrérie des Pères ou Prêtres de la Mission… »
Et il ne s’agit pas là d’une expression vague et classique dans pareil contrat puisque son contenu est largement explicité par la suite : d’octobre à juin, on prêchera des Missions au rythme suivant : un mois de mission et quinze jours « en leur maison commune ». Pendant les mois de juin, juillet, août et septembre, on rendra service aux curés qui le demanderont et l’on étudiera « pour se rendre d’autant plus capables d’assister le prochain. »
d) Outre la Communauté de travail et de vie, le Contrat prévoit et précise aussi la communauté de biens
Le texte insiste d’abord sur la gratuité des Missions. Les Missionnaires choisis par saint Vincent devront « s’appliquer entièrement et purement au salut du pauvre peuple, allant de village en village, aux dépens de leur bourse commune ».
Cette « bourse commune » sera alimentée régulièrement par le revenu de la somme de Fondation : Ladite somme de 45 000 livres sera par ledit sieur de Paul, de l’avis des dits seigneur et dame, employée en fonds de terre ou rente constituée, dont le profit et revenu en provenant servira à leur entretien, vêtements, nourriture et autres nécessités ; lequel fonds et revenu sera par eux géré, gouverné et administré comme chose propre »
Ces précisions sont importantes car saint Vincent conservera ce statut économique pour sa Congrégation et ses communautés locales. Les membres de la Communauté renonçant à toutes autres sources de revenu (charges, bénéfices, dignités) ; le travail des missions étant gratuit, la Communauté des missionnaires ne pouvait donc vivre et subsister que par las revenus ou rentes de la Fondation, lesquels constituaient ce que le contrat appelle « la bourse commune ».
C’est là, dirions-nous aujourd’hui dans un sens purement économique, un système « capitaliste » : Les communautés de la Mission vivant de revenus et cela pour assurer et la gratuité des missions et la durée de la mission. Car, si les missionnaires vivent de bénéfices ou dignités « personnels », la tentation sera grande de regarder en arrière. Or, il faut à la Mission des ecclésiastiques qui s’y adonnent « entièrement et purement ».
La Communauté de biens, dans ce contrat, n’est donc pas le fait de mettre en commun la totalité des « fruits du ministère », puisque le ministère est gratuit ; elle est d’une part dans la renonciation aux revenus personnels et d’autre part dans le fait de vivre de la « bourse commune » alimentée par les revenus de la Fondation.
Le Contrat de Fondation du 17 avril 1625 se présente bien comme l’aboutissant et une sorte de synthèse de l’expérience missionnaire de saint Vincent au cours des années 1617-1625. La « communauté » y apparaît comme un moyen nécessaire pour la Mission : il faut être plusieurs pour faire face au travail ; il faut être ensemble pour le bien faire ; il faut y être consacrés « entièrement et purement ». Ce sont ces évidences Apostoliques, puisées dans l’expérience de huit années de missions, qui sont à l’origine de la communauté de la Mission, et de ses premières structures. [51]