Ordinations Diaconales. Maximilian Andrei CM et Gaspard Ntakirutimana CM – Chapelle Saint Vincent de Paul, Paris 7 Octobre 2018
Homélie de Mgr Antoine Hérouard, évêque auxiliaire de Lille
Textes : Is 61 – 1P4 – Mt 20
Serviteurs de la mission
Maximilien, Gaspard,
Grande joie pour moi de célébrer ici, dans cette chapelle auprès de la châsse de St Vincent de Paul, votre ordination diaconale, en vue du sacerdoce, ordination au service. Service du Christ et de l’annonce de sa Parole. Service de l’Eglise auquel vous vous consacrez dans la diaconie de l’Eglise, dans l’aide à l’accomplissement de sa mission auprès de l’évêque et dans les champs qui vous seront confiés par vos supérieurs, dans la célébration de certains des sacrements (baptême, mariage), dans la participation à la prière de l’Eglise par la Liturgie des heures, dans l’expression de la charité du Christ, en particulier auprès des plus pauvres et des plus petits. Savoir contempler le Christ Jésus dans le visage des pauvres.
Cette mission diaconale qui va vous être donnée par l’ordination, elle est aussi pour vous le fruit, l’aboutissement de tout un cheminement, dans votre désir de devenir prêtre au sein de la Congrégation de la Mission. Vous arrivez aujourd’hui, forts de votre histoire humaine et spirituelle, l’un et l’autre, différemment, vous avez vécu un cheminement long, depuis vos pays d’origine, la Roumanie et le Rwanda, les expériences humaines, familiales, ecclésiales qui vous ont marqué, à travers des étapes parfois difficiles, mais toujours dans le désir de vous consacrer au Christ et de vous mettre au service de sa mission. Le discernement des vocations n’est jamais facile, mais pour ceux qui savent lui faire confiance, Dieu conduit ses enfants là où il nous veut, et là où vous pourrez apporter le meilleur de vous-même. Vous avez prononcé vos vœux dans la congrégation de la mission, récemment pour toi Gaspard, il y a un peu plus longtemps pour toi Maximilian, à l’exemple et à la suite de Saint-Vincent-de-Paul pour vivre la mission, annoncer le Christ auprès des plus pauvres et savoir reconnaître en eux la présence vive du Sauveur.
Les textes qui ont été choisis pour cette liturgie sont, je le crois, tout à fait clairs quant à cette orientation fondamentale de votre ministère à venir.
C’est d’abord le texte du prophète Isaïe, où il proclame la mission qui est la sienne auprès du peuple que Dieu vient rejoindre et consoler après l’épreuve de l’exil à Babylone. C’est l’Esprit de Dieu qui est ainsi venu sur le prophète et qui l’a consacré pour cette mission. « Il m’a envoyé annoncer la Bonne Nouvelle aux humbles, guérir ceux qui ont le cœur brisé, proclamer aux captifs leur délivrance, aux prisonniers leur libération, proclamer une année de bienfaits accordée par le Seigneur, consoler ceux qui sont en deuil ». Mais nous ne pouvons jamais lire ce texte sans penser que Jésus lui-même l’a lu au moment où il commençait sa vie publique dans la synagogue de Nazareth, en choisissant ce passage et en précisant que cette Parole de l’Ecriture c’est Aujourd’hui, au jour où il la lisait qu’elle s’accomplissait. C’est donc dire que votre propre mission au service de la Parole de Dieu, elle va chercher à se mettre dans les pas du Christ, non pas pour se comparer à lui ou se prétendre comme un grand prophète, mais au contraire pour être des serviteurs, humbles et modestes de la Parole, de son annonce et de son témoignage. Comme nous le savons si Jésus a pu revendiquer pour lui la force de cette parole prophétique comme une annonce de son identité messianique, ses interlocuteurs ne l’ont pas accueilli et n’ont pu, en cet instant, croire en Lui comme l’envoyé du Père, le Fils bien aimé, Celui en qui vient s’accomplir le salut du monde. Tout ceci ne peut être que de nature à nous inciter à la modestie devant notre propre démarche missionnaire. S’il nous faut avoir le courage, l’inventivité, l’engagement de nous-même, il est si important de ne pas se vouloir propriétaire de la mission ou d’en rechercher des bénéfices pour nous-mêmes. L’ambition du serviteur est que par notre travail, humble, souvent caché, dans la proximité avec ceux que nous voulons rejoindre comme destinataires de la Bonne Nouvelle de l’amour de Dieu pour chacun, se réalise un peu de la présence du Christ chez les pauvres et auprès d’eux. Souvent nous ne savons pas le bien que nous pouvons apporter –ou non- à ceux que nous voulons rejoindre. Ce n’est souvent qu’après coup et de façon inattendue que le Seigneur nous fait découvrir quelque chose de ce qu’il a voulu accomplir par notre intermédiaire.
Si Isaïe nous introduit dans la mission même du Christ, Pierre nous indique aussi comment vivre cette dimension du service fraternel au sein même de la communauté. Vous avez choisi de vivre votre ministère, diaconal aujourd’hui, sacerdotal sans doute demain, au sein d’une congrégation, d’une société de vie apostolique, dans le partage d’une vie de communauté entre frères. Et Pierre vous y invite à vivre la charité fraternelle. « Soyez donc raisonnables et sobres en vue de la prière. Avant tout, ayez entre vous une charité intense. Pratiquez l’hospitalité les uns envers les autres sans récriminer. Ce que chacun de vous a reçu comme don de la grâce, mettez-le au service des autres, en bons gérants de la grâce de Dieu qui est si diverse ». Ces conseils d’attention mutuelle et de partage des dons que Dieu nous donne au profit de la communauté, s’ils étaient vrais pour la communauté chrétienne à laquelle Pierre s’adresse, ils le sont aussi pour vous aujourd’hui, d’abord dans les lieux de vie qui sont les vôtres, et auprès des frères qui vous sont donnés, et chacun sait que la vie de communauté n’est pas toujours facile – et plus largement au service des communautés chrétiennes que vous rencontrerez ou que vous contribuerez à rassembler.
Le message du service, de l’attention aux plus petits, de la remise de nous-mêmes à ceux qui sont dans le besoin, nous savons bien à la fois, qu’il est au cœur de notre foi chrétienne, au cœur de votre engagement de Lazaristes, à la suite de Saint-Vincent-de-Paul, lui qui a su être présent à tant de détresses, rivaliser d’ingéniosité pour se rendre proche des plus grands et des plus petits, puiser dans la force de la prière les ressources nécessaires à son action, si nous savons donc l’importance vitale du service, il nous faut aussi savoir combien cela passe par notre propre transformation, notre propre conversion. Ce n’est jamais évident de pouvoir vivre l’invitation à la suite du Christ : « Celui qui veut devenir grand parmi vous sera votre serviteur, celui veut être parmi vous le premier sera votre esclave. Ainsi le Fils de l’Homme n’est pas venu pour être servi mais pour servir et donner sa vie en rançon pour la multitude. »
Il y a bien des façons de donner sa vie et s’il n’y a pas lieu de rechercher d’une façon un peu romantique une forme de martyre, nous savons que la mission a un prix parfois élevé, que le service des autres ne va pas sans mort à nous-mêmes, que la charité du Christ vous conduit sur des chemins que nous ne maîtrisons pas.
Gaspard et Maximilian, au moment d’invoquer l’Esprit-Saint pour qu’il vous configure au Christ serviteur, demandons qu’il fasse de vous des diacres pleinement dévoués et donnés à votre mission, capables de vivre l’humilité des vrais serviteurs, désireux d’engager votre existence dans le don que le Christ de sa vie, sachant reconnaître et servir la présence du Christ dans les plus petits de vos frères. Rappelez-vous que vous serez diacres pour toute votre vie et que l’humble service de Dieu et des hommes soit toujours la source de votre joie !
Amen
Monseigneur Antoine HÉROUARD 🔸
Il y a bien des façons de donner sa vie et s’il n’y a pas lieu de rechercher d’une façon un peu romantique une forme de martyre, nous savons que la mission a un prix parfois élevé, que le service des autres ne va pas sans mort à nous-mêmes, que la charité du Christ vous conduit sur des chemins que nous ne maîtrisons pas.
Explications :
Photos : P. Éric RAVOUX CM