Syméon, nous dit St Luc, était un homme juste et religieux. Il attendait la Consolation d’Israël, il voulait voir le Christ, le Messie du Seigneur….Voir !

Homélie. Présentation du Seigneur au Temple. 2 février 2020. Chapelle Saint Vincent de Paul – Paris

Syméon, nous dit St Luc, était un homme juste et religieux. Il attendait la Consolation d’Israël, il voulait voir le Christ, le Messie du Seigneur….Voir ! C’est le plus profond désir qui puisse monter de notre cœur et de notre foi… Oui, nous aussi, nous voudrions voir, voir Dieu !

Or, voici que dans l’Evangile d’aujourd’hui, Syméon voit. Il voit dans l’enfant reçu dans ses bras,  le Sauveur, la lumière qui se révèle aux nations. Désormais il peut s’en aller car il l’a vu, il l’a rencontré celui qu’il attendait : cette rencontre n’est donc pas le fruit du hasard… Oui, la personnalité de Syméon est bâtie sur ce désir qui l’habite tout entier : voir le Christ, le Messie du Seigneur. Il était en attente du Messie. Il vivait cette attente dans la patience, attitude fondamentale des humbles de cœur…

Comment ne pas admirer Syméon ?! En effet, Il nous interpelle et il nous montre qu’il n’y a pas d’attente vraie, il n’y a pas de rencontre profonde sans revêtir cette attitude d’humilité et de patience. Nous savons aussi, par expérience, que si nous voulons donner par nous-mêmes un sens à notre vie, nous ne découvrirons absolument rien. Et, finalement, la vérité sur nous-mêmes se reçoit humblement, souvent après une longue attente, et parfois après bien des larmes. De même, toute vraie rencontre avec autrui est préparée par une attente du cœur, une distance humble, sinon la découverte ne se fera jamais, ou seulement en superficie !…

C’est pourquoi, il serait intéressant, maintenant, de nous poser la question : comment vivons-nous nos rencontres avec les autres ? Ne sommes-nous pas, souvent, trop pressés de connaître tout de l’autre ?Ne sommes-nous pas indiscrets , voulant, à tout prix, tout savoir de l’autre, le dépouillant ainsi de son mystère pour mieux le posséder ?!

Oui, finalement, pour découvrir le Seigneur comme pour découvrir ceux qui nous entourent, il y faut beaucoup de temps, se tenir humblement à distance, avec respect et délicatesse. Il faut savoir attendre, car l’autre n’est pas une forteresse qu’il faut assiéger, mais un mystère qu’on apprend à découvrir au bout de la patience et de la persévérance. Et toujours avec la conviction que « l’essentiel est invisible pour les yeux et qu’on ne voit bien qu’avec le cœur. » Tout ceci est valable donc, pour ce qui concerne la connaissance des autres, comme pour la connaissance de Dieu : savoir attendre,  et maintenir une certaine distance empreinte d’humilité, de respect et de patience.

Syméon attendait…et le Christ, le Messie de Dieu, est venu vers lui : il a reposé dans ses bras. Ebloui, Syméon laisse éclater sa joie : « Maintenant , ô Maître souverain, tu peux laisser ton serviteur s’en aller en paix…Car mes yeux ont vu le salut que tu préparais à la face des peuples : lumière qui se révèle aux nations… »

Pourtant, Jésus ne s’est pas manifesté à Syméon et Anne comme le Dieu de gloire et de majesté. Il ne s’est pas manifesté dans la lumière de la transfiguration ! Oui, Dieu c’est souvent l’Inattendu, le Surprenant !… Déjà, au temps de Syméon, on attendait Dieu dans la gloire et la puissance … et il vient dans la personne d’un enfant, un vrai bébé vagissant, qui ne sait même pas se tenir debout et qu’il faut porter dans ses bras. …

De même, il est curieux de constater que , selon St Luc, ce ne sont pas les autorités officielles, prêtres et scribes, qui reconnaissent Jésus…mais des gens obscurs, simples et ordinaires, Syméon et Anne.  Et, par ces deux représentants des « petites gens », c’est tout le peuple des « pauvres que Dieu aime » qui vient à la rencontre du Sauveur. C’est à eux que le Sauveur se révèle en priorité.

 Syméon et Anne représentent les pauvres, parce qu’ils sont « vieux » l’un et l’autre, de cette catégorie sociale que toute société a tendance à oublier et à ne pas respecter. Malgré cela,  ils discernent la « Présence » que les autres ne voient pas. Pourquoi cela ? Parce que pour discerner cette « Présence » , il faut être pauvres. De cette pauvreté qui nous donne les yeux des simples, et des cœurs purs qui savent voir, au-delà des apparences. Qui savent voir cette Présence que, souvent, les sages et les savants ne savent pas voir…

Dans notre eucharistie d’aujourd’hui, demandons au Seigneur de répandre sur nous son Esprit d’amour, car pour voir vraiment il faut aimer vraiment. Et, qui aime vraiment est toujours en attente, toujours prêt à accueillir ; son cœur veille et sait discerner à tout moment la présence de Dieu.

Seigneur, fais de nos cœurs des cœurs de pauvres, pour que nous sachions Te reconnaître dans la pauvreté des apparences où tu te caches. Amen