A quelques jours de la fête de la Toussaint et de notre intercession pour nos sœurs et frères défunts, la liturgie nous invite à méditer sur le mystère central de notre foi : la résurrection. Les textes nous invitent à prendre conscience que la résurrection n’est pas seulement un phénomène d’après Pâques.
Jean-Daniel PLANCHOT CM
Homélie 32e Dimanche du Temps Ordinaire – Chapelle Saint Vincent de Paul – Paris. (2 Mac 7 1-2. 9-14 ; Ps 16 ; 2 Th 2 16 – 3 5 ; Lc 20 27-38)
A quelques jours de la fête de la Toussaint et de notre intercession pour nos sœurs et frères défunts, la liturgie nous invite à méditer sur le mystère central de notre foi : la résurrection. Les textes nous invitent à prendre conscience que la résurrection n’est pas seulement un phénomène d’après Pâques. Elle concerne toute l’humanité, et même ceux qui ont précédé Jésus dans le cours de l’histoire ont pu connaître ce mystère. Il est logique, puisque Jésus est venu pour accomplir, de trouver dans l’Ancien Testament des témoignages de la foi en la résurrection. Le livre des Maccabées contient un des tous premiers.
Ce témoignage prend une forme très concrète : un fils torturé et mis à mort sous les yeux de ses frères et de sa mère prétend que Dieu, qui lui a donné ses membres, les lui rendra. Cette conviction trouve son fondement dans la fidélité de Dieu. Puisque Dieu nous a donné la vie, il ne nous la reprendra pas. La première condition pour ressusciter est donc un acte de confiance dans la fidélité de Dieu.
Un autre exemple de cette confiance indéfectible en la fidélité de Dieu nous est donné par Jésus, sur la Croix : « entre tes mains je remets mon esprit ». Puisque Dieu est fidèle, lui remettre notre vie et tout ce que nous sommes, est s’assurer que personne ne nous en dépossèdera, et que la vie nous sera rendue. Mais avant d’être un couronnement ou une récompense, la résurrection est en elle-même un combat.
L’exemple grotesque de la femme qui épouse sept maris successifs au nom de la loi du lévirat montre que les Sadducéens perçoivent la résurrection comme une continuité avec la vie terrestre, et c’est pourquoi ils la refusent. Ils ont raison. Mais ils ont à faire un pas de plus et accepter la résurrection pour ce qu’elle est et non la refuser pour ce qu’elle n’est pas.
Comme l’explique Jésus faisant allusion aux anges, il y a un vrai hiatus entre la vie que nous connaissons ici-bas et celle qui sera donnée en partage. En présence de Dieu, nous serons en parfaite communion avec lui, l’expression de notre vie ne sera qu’action de grâce. Tout amour vécu ici-bas dans l’ordre de la charité demeurera et sera transfiguré.
Nous connaissons cette différence d’ordre. Mais le danger subsiste d’imaginer seulement un saut qualitatif. Or la différence radicale est annoncée dans l’évangile par l’expression « quand Jésus passa de ce monde à son Père ». Jésus passe d’un monde à un autre. Ce passage se fait par la mort, une vraie mort. Pas seulement une mort biologique, mais une mort métaphysique, si l’expression existe. C’est-à-dire que la résurrection n’est pas une simple réanimation biologique qui réduirait la mort à un sommeil douloureux et temporaire, mais elle est un passage de la mort à la vraie vie. C’est pourquoi la résurrection est la victoire contre la mort, la mort en elle-même, et non la victoire contre une mort particulière, celle d’une personne déterminée, Jésus de Nazareth. Nous le disons d’ailleurs dans le Credo : « il est ressuscité d’entre les morts », et non pas « quelqu’un de mort est ressuscité ». Ce n’est pas sa mort qui est dépassée, mais la mort qui est vaincue.
En vainquant la mort, le Christ nous extirpe de la mort. Il n’y a donc pas que la Passion et la Croix qui soient un combat, la résurrection l’est aussi. La résurrection est une partie intégrante du combat pour le salut des hommes. Jésus n’est pas seulement le ressuscité, il est aussi le ressuscitant, le principe actif de la résurrection des hommes.
Ce qui nous aide à mieux comprendre pourquoi entre la Croix et la Résurrection il y a un délai, pourquoi entre la victoire définitive de Jésus remportée au matin de la Pâques et l’avènement du Christ dans la gloire il y a un temps où nous luttons encore contre la mort, pourquoi entre notre baptême où nous sommes plongés dans la mort du Christ et notre accès à la plénitude la vie, il y a le temps où le Christ nous attire à lui, le temps où il nous enfante à la vie malgré nos résistances. Le temps où la résurrection est une lutte.
Il est donc grand temps de laisser le Christ nous enfanter à la vie filiale qui seule peut faire notre béatitude. C’est par le psaume que nous participons déjà à la louange des anges et des fils et que nous découvrons la vérité de nos âmes et le dessein de Dieu pour ses enfants. Il chante la gloire de celui qui nous appelle à la vie, tenant pour vraies et acquises les richesses à venir : « Et moi, par ta justice, je verrai ta face : au réveil, je me rassasierai de ton visage. »